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Avant la révolution actuelle, le roi était foncé de ménager la noblesse, de négocier avec le clergé, de composer avec les parlemens, de combler la cour de faveurs ; il n’avait pas plus qu’aujourd’hui le pouvoir absolu, qui n’existe nulle part… Le roi établissait seul les impôts : c’était un embarras de plus, une source éternelle de discussion entre lui et ses peuples… Sa volonté, même arbitraire, s’exécutait sans obstacles ; mais ce genre d’autorité n’était utile qu’aux ministres : ils doivent seuls le regretter ; il faudra désormais qu’ils soient plus habiles. En établissant la responsabilité des ministres, l’assemblée nationale a consacré l’impeccabilité du roi. – Le roi seul administrait. Voilà le point essentiel, voilà le pouvoir qu’il faut empêcher l’assemblée nationale de retenir plus long-temps, et sans lequel l’autorité royale ne serait qu’un fantôme. Administrer, c’est gouverner ; gouverner, c’est régner ; tout se réduit là… Comparez maintenant le nouvel état de choses avec l’ancien régime ; c’est de là que naissent les consolations et les espérances. Une partie des opérations de l’assemblée nationale, et c’est la plus considérable, est évidemment favorable au gouvernement monarchique. N’est-ce rien que d’être sans parlement, sans pays d’état, sans corps de clergé, de privilégiés, de noblesse ? L’idée de ne former qu’une seule classe de citoyens aurait plu à Richelieu. Si cette surface égale convient à la liberté, elle facilite l’exercice du pouvoir. Plusieurs règnes d’un gouvernement absolu n’auraient pas fait autant qu’une seule année de liberté pour l’autorité royale. » Que dites-vous le cette vue jetée sur l’administration française, telle que l’a créée la révolution, également favorable à l’égalité des citoyens et à l’exercice du pouvoir central ? Voilà la centralisation prévue et définie dès 1790 par Mirabeau. Ici encore Mirabeau voyait la révolution dans l’avenir et non dans le présent.

Que fallait-il pour profiter de cet accroissement du pouvoir administratif ? Il fallait une royauté forte, un pouvoir exécutif libre et puissant. Sur ce point, Mirabeau est invariable. Point de salut pour la société, point de salut pour cette révolution de 1789 qu’il veut régler et affermir, si la royauté ou le pouvoir exécutif n’a pas les moyens d’agir librement et résolument. « Vous ne ferez jamais la constitution française, avait-il dit à l’assemblée nationale, ou vous aurez trouvé un moyen de rendre quelque force au pouvoir exécutif. » Si telle était l’opinion de Mirabeau à la tribune de l’assemblée constituante, en face de la révolution, que devait-ce être dans les notes qu’il adressait au roi et à la reine ? Là, il était à son aise pour se montrer royaliste, et il l’est ; mais il l’est toujours au nom de la révolution de 89 et avec les principes de cette révolution. « Lorsqu’on admet, dit-il dans sa. Quarante septième note, qui est un exposé complet de son plan politique, lorsqu’on admet ces deux données dans la formation d’un gouvernement, la permanence