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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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30 septembre 1851.


Nous demandons à nos lecteurs la permission de leur parler aujourd’hui très peu de la situation intérieure. Il ne s’est rien produit durant ces derniers jours qui l’ait pu modifier beaucoup, et si dans ce temps de lassitude où nous sommes, les événemens veulent s’accomplir sans faire de bruit, nous ne voyons pas trop pourquoi le public tiendrait à ce que la presse fît plus de bruit que les événemens.

Il est en effet quelque chose de caractéristique dans l’aspect du moment actuel, il est un trait qui s’y marque davantage à mesure qu’on avance, et que l’on n’était pourtant guère à même de prévoir. Personne ne se dissimule que nous avons en perspective un passage difficile ; on compterait aisément les symptômes qui en annoncent l’approche ; les positions se dessinent, les intentions s’accusent, les circonstances se tendent : on croirait pour ainsi dire sentir une vis qui se serre ; mais en se serrant, elle ne crie pas. L’année d’avant ou même il y a seulement six mois, on se figurait que plus on toucherait de près au terme désigné par la date légale pour une solution quelconque, plus on serait accablé de transes et d’alarmes. C’est tout le contraire qui arrive, et l’événement donne, en vérité, un démenti curieux à l’idée qu’on s’en était formée d’abord. Consultez l’impression la plus générale, examinez de sang-froid l’état d’esprit où sont la plupart de ceux qui vous entourent, chacun interrogeant son propre cercle. Vous trouverez deux points très établis dans l’opinion, l’un que les choses ne peuvent absolument pas aller long-temps encore comme elles vont, l’autre qu’elles iront mieux sans que l’on sache comment ce mieux viendra. On se représente au plus juste toutes les menaces suspendues sur l’existence du pays, on distingue aussi nettement que jamais toutes les mauvaises chances ; mais on se refuse à penser qu’elles doivent l’emporter sur les bonnes. Comment les bonnes l’emporteront-elles ? C’est ce qu’on ne devine pas. Quel sera le dénoûment de la crise ? Nul ne se hasarderait à jouer là-dessus au prophète, et si ferme que l’on soit dans son parti, personne n’oserait assigner