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une conférence universelle, et la science, en élisant, comme on l’a dit, pour sa capitale temporaire chacune des villes les plus importantes, a livré successivement chaque partie de cette vaste contrée à l’examen, à la méditation de tous. Naturalisés en France par M. de Caumont, dont la vie entière a été consacrée à l’étude et au bien public, les congrès ont imprimé au mouvement intellectuel des provinces le plus vif élan. Ils ont fait pour l’histoire, les sciences naturelles, l’archéologie, l’économie sociale, l’agriculture, tout ce qu’on peut attendre du zèle et des lumières d’hommes distingués que stimule avant tout le désir d’être utiles. Un moment suspendues au milieu des agitations de 1848, ces réunions ont repris le cours de leurs travaux. En 1849, le congrès scientifique de France a tenu à Rennes sa seizième session, et, au nombre des matières qui ont été traitées, on peut citer les questions suivantes : De la géographie ancienne et du moyen-âge, de l’architecture militaire et de l’architecture religieuse en Bretagne, de l’influence de la réforme de Luther sur les arts. La dix-septième réunion a eu lieu à Nancy en septembre 1850, et, parmi les mémoires publiés à la suite des procès-verbaux, nous avons remarqué les extraits historiques de M. Servais sur la fabrication et le cours des monnaies dans le Barrois et la Lorraine aux XIVe, XIe et XVIe siècles; un bon travail de M. l’abbé Marchal sur la bataille de Nancy; l’histoire des corporations d’arts et métiers dans la Lorraine, le Barrois et les trois évêchés, par M. Le Page, et les recherches de M. Auguste Digot sur les écoles épiscopales et monastiques de la province ecclésiastique de Trêves. La Société française pour la conservation des monumens s’est également assemblée à Bourges en 1849, à Auxerre en 1850. Cette société, on le sait, ne se borne pas à publier les travaux de ses membres. Essentiellement pratique dans son but, elle vote des fonds pour la réparation des églises ou autres édifices remarquables sous le rapport de l’art ou de l’antiquité; elle fournit des plans et des dessins aux fabriques, distribue des livres d’archéologie, fait faire des fouilles, des moulages, achète des antiquités pour les musées, et se réunit chaque année en congrès archéologique.

Les réunions que nous venons de mentionner comptent déjà plusieurs années d’existence, et, contrairement à ce qui se passe d’ordinaire chez nous, le zèle des personnes qui y prennent part ne s’est nullement refroidi. Loin de là : depuis deux ans, un nouveau congrès, celui des délégués des sociétés savantes des départemens, sous la direction de l’Institut des provinces, s’est réuni à Paris, dans le Luxembourg. Dès la seconde session, soixante-dix sociétés de département, représentées directement par leurs mandataires, avaient fourni les élémens d’une assemblée imposante, à laquelle étaient venus se joindre de l’étranger, comme de Paris, une foule d’hommes distingués dans les sciences, l’histoire, l’agronomie et l’économie politique. L’Institut des provinces, qui a pris vis-à-vis de l’Académie des Inscriptions une attitude agressive, a décidé qu’il décernerait des prix aux meilleurs ouvrages publiés dans les départemens, et les considérans dont il a fait précéder cette décision relèvent d’une façon assez piquante quelques-uns des abus les plus graves de la centralisation en matière d’archéologie et d’histoire. « Considérant, dit dans son programme le directeur de l’Institut, M. de Caumont, que les auteurs qui sollicitent les récompenses des sociétés savantes de Paris ne sont pas toujours ceux dont les ouvrages sont les plus dignes d’être distingués, — que les œuvres de ceux qui ne