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LA SUISSE


SOUS


LE GOUVERNEMENT DES RADICAUX.




M. DRUEY A LAUSANNE. - M. JAMES FAZY A GENEVE. - LES RADICAUX ALLEMANDS A FRIBOURG ET A BERNE.




La Suisse offre, depuis quelques années, un curieux spectacle. Tandis que partout ailleurs le radicalisme a fait de vains efforts pour s’installer et se maintenir au pouvoir, en Suisse il a derrière lui, — dans quelques cantons surtout, — une assez longue période de vie officielle et de pratique gouvernementale. Si l’application seule condamne ou légitime les théories, la Suisse doit désormais savoir à quoi s’en tenir sur les théories radicales. À Genève et à Lausanne, l’expérience a été poussée jusqu’à ses dernières limites ; à Fribourg et dans quelques cantons allemands, elle n’a pas été moins résolûment abordée. Partout il est possible aujourd’hui, et le moment est venu peut-être d’en prévoir ou d’en constater le résultat.

Un premier fait est à noter dans l’épreuve si décisive à laquelle viennent d’assister quelques cantons : c’est que le triomphe du radicalisme en 1845 et 1847 a partout été précédé par une longue période consacrée à la pratique la plus sincère des doctrines libérales. Seulement c’était le système du gouvernement paternel, ou de la tolérance la plus complète, qui avait présidé généralement à l’application de ces doctrines. Ce système avait quelques dangers qu’on n’aperçut pas tout d’abord. La plupart des cantons jouissaient en apparence d’une sécurité profonde ; la liberté des cultes y régnait presque sans limites ; l’instruction politique y florissait sous la direction de professeurs distingués ; le commerce et l’industrie s’y développaient, grace à la libre concurrence ; l’administration enfin remplissait