avec 68,291 tonneaux de marchandises. C’est là un emploi tout nouveau de la marine marchande de l’Angleterre. Et comme il n’y a aucune raison de penser que cette activité se soit ralentie dans le second trimestre de 1850, on est autorisé à dire que la participation des bâtimens anglais à la navigation indirecte, laquelle ne leur est devenue accessible que par l’abolition des anciennes lois, a plus que compensé la perte signalée dans le mouvement de la navigation directe.
En y réfléchissant un peu, il est facile de comprendre que cet affaiblissement de la navigation directe était inévitable, et qu’il est plutôt un signe de prospérité que de décadence. En effet, la mise en vigueur du bill du 26 juin 1849 a surpris un grand nombre de navires engagés dans des opérations lointaines. Si ce bill n’eût pas ouvert une nouvelle carrière au pavillon anglais, ces navires, une fois leurs opérations terminées, auraient été obligés de regagner les ports d’Angleterre pour y chercher d’autres transports ; mais le bill du 26 juin 1849, qui a appliqué à partir du 1er janvier 1850, faisant tomber les barrières qui leur fermaient le commerce indirect, c’est-à-dire les opérations de pays étranger à pays étranger, ils se sont naturellement empresses de profiter de cet avantage : tout nouveau pour eux. Tel navire qui était à Rio-Janeiro, au lieu de revenir en Angleterre pour quêter du fret, a pris tout de suite les marchandises qui se présentaient à Rio pour New-York, ce qu’il n’aurait pu faire avant le 1er janvier 1850. Cette opération de pays étranger à pays étranger, il a pu la renouveler plusieurs fois avant de rentrer en Angleterre. Cent autres ont pu le faire comme lui. D’où il suit que les ports anglais ont pu être moins fréquentés par les bâtimens anglais, sans qu’on ait le droit d’en conclure que l’activité du commerce anglais a diminué. La conclusion contraire est bien plus juste et bien plus fondée, car on voit, par cet exemple que l’activité du commerce anglais se serait seulement déplacée, et qu’elle n’a paru faiblir sur un point que parce qu’elle s’étendait, se multipliait sur une foule d’autres points.
Et ceci explique parfaitement des faits qui, au premier abord, paraissent inexplicables. Comment, par exemple, faire concorder l’accroissement du travail dans les chantiers des constructeurs anglais avec cette diminution apparente du mouvement maritime qui résulte des états des douanes ? Comment ferait-on construire de nouveaux et puissans navires, s’il était vrai qu’il n’y eût plus déjà d’emploi pour une partie du matériel existant ? Il y aurait là, on en conviendra, une anomalie peu concevable de la part du commerce anglais, qui a l’instinct si sûr. Or, que les constructions de navires aient augmenté, c’est un fait indéniable. Les plus ardens adversaires du rappel des vieilles lois de navigation ont eux-mêmes fait construire plus que jamais. M. Lindsay, par exemple, un des plus puissans armateurs d’Angleterre,