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La Grèce, on le voit, comprend aujourd’hui tout le prix des chefs-d’œuvre dont ses enfans sont devenus les seuls gardiens. Les efforts de la société archélogique d’Athènes ont porté d’heureux fruits. Statues, bas-reliefs, fragmens, vases de Corinthe ou d’Égine, médailles, inscriptions, sarcophages, tout a été pieusement recueilli et déposé dans le temple de Thésée. L’idée de ces pieux dépôts est toute grecque ; on fera bien de s’y tenir. Les temples païens étaient des sanctuaires à la fois jour les dieux et pour l’art : les transformer en musées, c’est leur rendre à moitié leur destination primitive.


III

Des résultats importans à divers titres ont de bonne heure, nous l’avons dit, manifesté la féconde influence de la société archéologique. Le parthénon, l’Erechteum et les Propylées, dégagés et restaurés, ont inspiré trois belles études exécutées sur l’Acropole à des élèves distingués de l’école de Rome[1]. Avant les récens travaux des Hellènes, M. de Laborde n’aurait assurément pas conçu dans d’aussi vastes proportions le grand ouvrage qu’il publie sur les monumens grecs. L’école française d’Athènes, représentée ici même par un nom cher aux lettres, a donné sur le temple de Minerve une ingénieuse monographie[2]. Les études allemandes sur l’archéologie grecque sont presque toutes antérieures à la naissance de la société d’Athènes. Quelques mémoires ont été cependant suscités par cette société en Allemagne ; nous citerons entre autres celui de MM. Ross, Ed. Schaubert et Chr. Hansen, sur le temple de la Victoire aptère, publié à Berlin en 1839. De nombreuses inscriptions, exhumées par les ouvriers de l’hétairie, ont enrichi la grande collection de M. Bœckh. Si la mort, une mort prématurée et cruelle, n’eût fait de la Grèce elle-même, qu’il étudiait avec passion, le tombeau d’Ottfried Müller, ceux qui connaissent son Manuel d’archéologie peuvent calculer l’immense parti que cet autre Winkelmann eût tiré des recherches et des fouilles modernes. Enfin, depuis que rien n’obstrue plus les modèles éternels de l’architecture antique, le pinceau, le crayon, la photographie, en reproduisent plus aisément et plus fidèlement l’image et secourent ainsi par momens l’art qui s’égare et le goût qui s’affaiblit.

Cependant, de toutes les conséquences heureuses produites par la conservation et l’entretien des temples antiques, il en est une que l’avenir se chargera de tirer tout entière, et que dès à présent je dois faire entrevoir : je veux parler de cet accord entre les monumens grecs et la nature qui les encadre, accord merveilleux qui, grace aux intelligentes

  1. MM. Paccard, Tétaz et Desbuissons.
  2. Voyez, dans la Revue du 1er décembre 1847, le Parthénon, de M. E. Burnouf.