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et amies que vous avez en ce pays. Le principal de ceux de ce premier nombre a besoin sans doute de la joye que vous leur apporteriez ; car il a tant de fatigue par l’emploi général de toutes les affaires qui son présentement entre ses mains, qu’en vérité vous lui devez votre présence. Je vous diray sur le propos de ses fatigues, que sans son secours je mourrois des miennes, et que tout de bon je ne scay pas ce que nous deviendrions sans luy. Si vous ne venez, je vous diray que je ne sçay pas non plus ce que nous ferons sans vous. Venez donc afin de nous faire éviter cette fâcheuse extrémité où nous tomberons, si vous ne nous secourez un peu. Sérieusement, je le souhaite avec une passion que rien n’égale que le désir que j’ai que vous me conserviez votre amitié, et que vous croyiez que la mienne pour vous me fait mériter la continuation de celle que je vous demande. Vous voulez bien que je fasse ici mes compliments à Mlle de Vandy. »


LETTRE DE MADAME LA COMTESSE DE MAURE A SON MARI A BORDEAUX.


9 septembre 1652.

« Madame de Longueville a mandé à Juste qu’il me donnast son portrait. Vous savez la joye que j’en ay ; mais il faut que ce soit vous qui en remerciyez madame de Longueville, car pour moy je ne le saurois faire, que par vous. Il faudrait une plus belle lettre que je ne suis capable d’en faire une pour lui témoigner combien je luy suis obligée d’un si beau présent. Tout de bon, je ne saurois entreprendre cela. Je souhaite passionnément qu’elle le puisse voir bientôt dans ma chambre qui ne lui déplaist pas, et qu’il rend tout-à-fait belle, et j’ay bien plus de peine à la quitter que je n’en avois quand il n’y étoit pas. »


RÉPONSE DE MADAME LA COMTESSE DE MAURE[1] A MADAME LA DUCHESSE DE LONGUEVILLE.


« Du 16 novembre 1652.

« Quelque reproche que votre altesse me fasse du silence que j’ai gardé avec elle, je ne m’en saurois repentir, puisqu’il m’a fait recevoir des marques de sa bonté par la plus belle et la plus obligeante lettre du monde. Je say bien aussi, madame, que V. A. n’a point creû que ce silence ayt pu venir d’aucun manquement de respect pour sa personne, ni de zèle pour son service, et que l’on ne sauroit courir ce danger-là avec elle quand elle ne croit pas que l’on soit tout à fait stupide. Si pourtant on restoit toujours à Paris, on croiroit pouvoir mander quelques nouvelles que Mme la marquise de Sablé auroit oubliées. Mais, madame, en ne faisant que d’y arriver, il en faut sortir, et ce n’est pas pour aller à Bordeaux. Jugez si ce n’est pas estre tout à fait malheureuse, surtout après ce que votre altesse a eu la bonté de m’écrire la dessus. Si du moins je pouvois rendre quelque service très humblement à V. A. durant le séjour que je pourray encore faire icy, ce me

  1. Manuscrits de Conrart, p. 245, 254, 255.