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Montmartin, d’autant plus susceptible de développement que, du cap de Barfleur à l’embouchure de la Loire, il n’existe pas sur la côte d’autre gisement calcaire. De riches bancs d’huîtres, gisant au large du havre, alimentent déjà des parcs formés dans l’intérieur, et cette pêche est appelée par l’établissement des chemins de fer à prendre une vaste extension. Tous ces élémens d’activité languissent avec la navigation locale et se ranimeraient avec elle. Un appel intelligent fait à la population avisée de cette partie du Cotentin serait assurément entendu, et si, contre toute attente. il ne l’était pas, quelque essaim sorti de Granville viendrait apprendre à ses voisins le prix de ce qu’ils auraient dédaigné.

Le havre de Saint-Germain-sur-Ay, formé sous l’action des mêmes circonstances géologiques que celui de Regnéville, s’en rapproche par une frappante analogie de configuration ; seulement, l’entrée en étant plus large et la rivière d’Ay ayant pour maintenir le creux de l’atterrage encore moins de force que la Sienne, la mer est ici plus agitée, l’ensablement plus avancé, et la montée de l’eau moindre. Aucune ville de quelque importance n’avoisine d’ailleurs le havre ; l’imperfection des chemins arrête à quelques pas du rivage les relations avec la mer, et, pour tout résumer en un mot, le mouvement annuel de la navigation roule à peine sur un millier de tonneaux ; aussi semble-t-on ne s’être pas même demandé si ce point de la côte vaut la peine qu’on le tire de l’état d’abandon où il languit. Il serait permis d’hésiter, si les moyens de restaurer l’atterrage n’étaient pas en même temps ceux de déterminer la mise en culture de 4,065 hectares de mielles attenantes, et si la plus-value à obtenir ne devait pas être le décuple des frais de l’entreprise. Le mal est de la même nature qu’à Regnéville, et les remèdes devraient se ressembler. Il faudrait aussi boiser ici 3 à 400 hectares de dunes, dont les vents de mer transportent le sable dans le havre. Les seuls travaux complémentaires que comportât l’état actuel du pays consisteraient à creuser au travers des mielles deux canaux amenant dans le havre, l’un de 7 kilomètres de distance, l’autre de 11, les eaux qui forment les lagunes de Surville et de Geffosse. Les eaux du sud concourraient, avec celles de l’Ay, à l’approfondissement du chenal sur presque toute sa longueur ; celles du nord assureraient à l’échouage de Saint-Germain la profondeur qui lui manque, et le rendraient bientôt accessible à toute marée. Les deux canaux conduiraient la tangue du havre au milieu même des mielles, et la dérivation des eaux qu’ils intercepteraient serait bientôt suivie du comblement des lagunes qu’elles entretiennent : ce seraient 250 hectares ajoutés aux terres à conquérir.

Du havre de Saint-Germain au cap Carteret, la côte court nord-nord-ouest, et sa courbure diffère peu de celle d’un arc de cercle de