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Les travaux qui se résument dans les trois mémoires couronnés à Paris, Berlin et Copenhague, mémoires coordonnés plus tard dans l’Essai sur les fondemens de la Psychologie, se placent entre 1803 et 1812 environ. Suffisans pour avoir rempli ces neuf années, ils ne furent toutefois que les délassemens studieux d’une carrière administrative. Au printemps de 1805, Maine de Biran avait été nommé par un décret impérial conseiller de préfecture du département de la Dordogne ; un nouveau décret impérial l’appela, le 31 janvier 1806, au poste de sous-préfet de Bergerac. Ni ses facultés, ni ses goûts ne le préparaient à la carrière administrative. Il chercha à suppléer au défaut de sa nature par une application consciencieuse aux devoirs de sa charge. On le voit aussi faire des efforts pour donner quelque développement à la vie intellectuelle et morale de ses administrés. Il cherche à introduire dans les écoles populaires de la Dordogne la méthode alors nouvelle de Pestalozzi, et fonde à Bergerac une société scientifique ayant l’étude de l’homme pour objet. Un sous-préfet pareil était également impropre, et par ses qualités et par les défauts de sa nature, à être l’un des agens du grand homme de guerre, de l’administrateur puissant, de l’ennemi des idéologues, qui gouvernait alors la France. Aussi ne voit-on pas que M. de Biran ait eu des chances d’avancement sous le gouvernement impérial. En 1809, il fut envoyé au corps législatif à la presque unanimité des votes. Ce choix modifia profondément son genre de vie il conserva pendant quelque temps sa sous-préfecture malgré ses fonctions législatives ; mais, le 24 juillet 1814, M. Delaval le remplaça à Bergerac, et, dans le courant de 1812, laissant ses enfans en Périgord aux soins d’une parente, M. de Biran vint se fixer à Paris, où devait être dès-lors sa résidence habituelle.

Les événemens sinistres, avant-coureurs de la fin du régime impérial, se déroulaient rapidement. Maine de Biran fut appelé par la confiance de ses collègues du corps législatif à prendre part à un acte diversement apprécié, mais assez important aux yeux de tous pour avoir inscrit le nom de ceux qui en furent les auteurs dans les annales de l’histoire politique. Il siégea, à la fin de 1813, avec MM. Laîné, Raynouard, Gallois et Flaugergues, dans la fameuse commission qui demanda qu’avant de déclarer la guerre nationale, l’assemblée fît entendre au monarque les plaintes et les vœux du pays, et réclama des garanties sérieuses pour la paix de l’Europe et la liberté des citoyens français. Il était uni à M. Laîné par les liens d’une étroite amitié, et tout devait le porter d’ailleurs à s’associer à la démarche dont cet homme d’état fut le principal instigateur. Les événemens étaient de nature à réveiller les espérances des royalistes, et c’est en qualité de royaliste que M. de Biran avait été exclu de la représentation nationale à la journée de fructidor. Sa nature personnelle ne le prédisposait