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Cette part faite aux inconvéniens de la charte d’Olmütz, il n’en demeure pas moins vrai qu’elle introduit plus d’équité, plus d’égalité dans toutes les régions de l’empire, de province à province aussi bien que d’individu à individu. Elle est peut-être inapplicable dans certaines de ses dispositions politiques, elle est appliquée dans presque toutes ses dispositions de droit civil, et elle oblige tout le monde à travers toute l’étendue des états autrichiens ; il n’y a plus de privilégié qui puisse se couvrir contre elle du droit spécial d’une patrie à part. Ainsi nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que ce sont à présent les vieux conservateurs, comme on les appelle, qui reprennent en Hongrie la position où s’est perdu M. Kossuth à force de dépasser toutes les limites, qui revendiquent la séparation de leur pays d’avec l’empire et son parfait isolement administratif, qui demandent pour la monarchie tout entière le système fédéral au lieu du système unitaire, des assemblées d’états particulières au lieu de diètes provinciales. S’ils demandent à peu près ce que voulait M. Kossuth au début de sa carrière de réformateur, ce ne saurait être par les mêmes motifs, puisque c’est justement à cause de ses essais de réforme qu’ils ont rompu avec lui. Et d’abord ils n’ont pas les mêmes alliés, ce qui prouve bien quelque chose. Ils s’appuient à Vienne sur les représentans les plus obstinés de l’absolutisme aristocratique ; ils s’appuient au dehors sur la Russie, qui les ménage et les caresse : c’est que pour tous, tant qu’ils sont, absolutistes, Russes ou vieux conservateurs, la charte du 4 mars et la pensée favorite du prince Swarzenberg, sa pensée de centralisation et d’égalité devant la loi, ont quelque chose de trop moderne qui ne s’accorde pas avec les données primitives de l’état autrichien, qui ne respecte pas assez les immunités et les souverainetés de détail dont se composait l’ancien monde. Nous racontions la dernière fois qu’on avait à vienne la bouche moins close que d’ordinaire ; à Presbourg, on parle aussi beaucoup, et les fêtes d’Olmütz ont récemment procuré aux nouvellistes un redoublement d’activité. Nous nous garderions bien de nous porter pour éditeurs responsables des bruits qui ont alors circulé dans cette capitale hongroise ; mais, fondés ou non, ils prouvent du moins qu’il n’y avait rien de trop extraordinaire à les mettre en circulation, et ils rendent un assez clair témoignage de l’état des esprits. On disait donc à Presbourg que les magnats hongrois conduits à Olmütz par le comte Zichy avaient récit de l’empereur Nicolas l’accueil le plus distingué, qu’on était convenu là que le système actuel, le système du 4 mars, ne valait rien ; que le comte Nesselrode en avait un meilleur tout prêt, et qui serait mieux l’affaire des hautes parties intéressées. On se rappelle que l’empereur n’a reçu à Olmütz ni le prince Schwarzenberg ni son collègue M. Bach, le seul qui, avec M. de Brück, maintenant démissionnaire, pût encore dater dans le cabinet de l’ère nouvelle où est entrée l’Autriche. On concluait à quelque froideur, le czar n’ayant d’ailleurs jamais eu de goût pour la personne assez altière du ministre dirigeant de Vienne. On allait jusqu’à supposer la chute du ministre ; on lui désignait même des successeurs, et lesquels ? — Les comtes Zichy et Hartig entre autres, sous la présidence du prince Windischgraetz. — Que ce soient là, si l’on veut, les rêves d’étranges patriotes qui se trouveraient encore heureux de recevoir leur patrie des mains du czar, soit ; mais on comprend bien qu’avec ces alliances et ces patronages ce n’est plus seulement d’une restauration de la patrie qu’il s’agirait ici, ce serait d’une restitution complète de tout l’ordre aboli par la charte du 4 mars. À ce compte, il y aurait en Autriche