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c’est de parler à l’ignorance, en s’en faisant écouter, la langue de la science et du bon sens. On a tellement abusé de la mise en scène littéraire, que le bon sens et l’honnêteté sont aujourd’hui les plus sûrs élémens de succès.

Riche en hommes éminens dans tous les genres, la Normandie, qui sait garder le culte religieux des nobles souvenirs, ne pouvait négliger la biographie, et, dans ce genre, elle est encore la province la plus féconde de la France. Les notices biographiques de MM. Boisard, Puiseux, E. Charles, de Beaurepaire, Gautier, Mancel, de Chennevières, sont, chacune dans sa spécialité, de bons morceaux de critique historique, philosophique, littéraire et artistique. Les études de M. Charma sur Lanfranc et sur Fontenelle unissent à l’exactitude historique une remarquable élévation de vues et de sentimens, et on y reconnaît l’influence salutaire qu’exerce sur l’érudition l’habitude de la pensée philosophique, car on sait que M. Charma s’est fait dans les sciences spéculatives un nom distingué.

Nous aurions encore bien des volumes à feuilleter pour compléter l’analyse des travaux publiés depuis quelques années par les érudits normands et pour donner une preuve nouvelle de ce que nous avons dit plus haut, à savoir que sur aucun autre point de la France l’activité n’a été aussi grande. Il suffira d’indiquer les études de M. l’abbé Cochet sur les églises des arrondissemens du Havre et de Dieppe, et ses recherches sur l’imprimerie à Dieppe ; la belle publication de M. de La Sicotière, intitulée le Département de l’Orne archéologique et pittoresque, publication qui, sous le rapport de l’exécution typographique et de la beauté des dessins, ne le cède en rien aux produits des presses parisiennes ; le Calvados pittoresque et monumental, dirigé par. M. G. Mancel ; les Antiquités gallo-romaines du vieux Evreux, de M. Bonnin ; l’Avranchin historique et monumental, de M. Le Héricher, et le Dictionnaire du patois normand de MM. Al. Et Éd. Du Méril. Ce dernier travail, plein de savantes recherches, s’ouvre par une introduction remarquable qui touche à la fois à de curieux problèmes d’histoire et de philologie, et le seul reproche que l’on puisse adresser aux auteurs, c’est, dans le relevé des mots de leur dictionnaire, de n’avoir point assez cherché, assez recueilli par eux-mêmes, et de s’en être quelquefois rapportés avec trop de confiance aux communications des autorités rurales. Les instituteurs et les maires de campagne ne sont souvent, en fait de linguistique et même d’orthographe, que des autorités fort peu compétentes, et l’orthographe du patois en particulier présente des difficultés qui sont de nature à embarrasser les hommes les plus habiles eux-mêmes. Les vétérans de l’érudition normande ne sont point restés en arrière de ce mouvement actif et fécond : M. le Prévost a continué ses recherches sur l’histoire et la topographie du département de l’Eure ; M. de Caumont a conduit jusqu’au cinquième volume le Bulletin monumental, collection précieuse, dans laquelle se trouvent consignés les travaux des membres de la société française pour la conservation des monumens, et il a publié récemment le second volume de la Statistique archéologique du Calvados ; M. Cheruel a donné, en 1850, un très bon volume contenant trois chroniques de Normandie restées inédites, et qui s’étendent de 473 à 1373. Les États provinciaux de la Normandie ont été pour M. de Formeville l’objet de longues et patientes recherches. L’Angleterre elle-même a fourni son contingent, et, sous le titre de the Records of the House of Gournay, M. Daniel Gurney a publié à Londres, en 1848, une série de documens importans.