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Voilà une étude qui faite sur le budget anglais, contiendra d’utiles enseignemens pour la France.

On se prévaut de l’impulsion donnée par sir Robert Peel et des résultats heureux de la liberté commerciale. Il y a là sans contredit un exemple à proposer à tous les gouvernemens ; mais, pour imiter, on n’est pas dispensé de se rendre compte et de suivre les effets du principe jusque dans les détails de l’application.

En rétablissant l’income-tax et en joignant, par forme de passeport, à cet impôt de guerre de larges réformes dans le système des impôts indirects, sir Robert Peel avait en vue trois principaux résultats il voulait combler le déficit, développer la production et le commerce, réduire le prix des denrées et des articles de grande consommation, de manière à résoudre, sans amener la dépression des salaires, le problème de la vie à bon marché : Aucune expérience n’a été plus féconde, et aucune politique n’a plus complètement atteint son but. L’ère ouverte par sir Robert. Peel marque le point culminant de la prospérité publique dans la Grande-Bretagne. Jamais l’industrie ne fut plus active, : ni les ouvriers mieux rétribués. Les exportations, qui représentaient en 1842 une valeur de 47 millions sterling, s’élevèrent à 52 millions en 1843, et à 58 millions en 1844 ; elles ont figuré dans le commerce de 1850 pour une valeur d’environ 65 millions, qui ex cède de 100 pour 100 celles de la France, et qui égale, ou peu s’en faut celles des autres nations européennes. Comme le prix des marchandises abaissé, grace à l’affranchissement des matières premières, les quantités exportées se sont accrues dans une proportion plus forte que celle qui semble indiquée par l’accroissement de valeur. Ainsi la filature de coton, qui, en 1832, employait 9 millions de broches, en a occupé 21 millions l’année dernière. En 1834, l’industrie cotonnière avait livré 262 millions de livres de coton ouvré au commerce ; en 1849, la production a été de 630 millions. En même temps, la formation de la richesse et l’accumulation du capital, faisaient de tels progrès, que l’Angleterre se trouvait capable, sans dessécher ni diminuer les autres sources du travail, de consacrer à la construction des chemins de fer près de 6 milliards de francs, et que les 10, 000 kilomètres de chemins de fer ouverts à la circulation avant la fin de l’année 1850 donnaient déjà un revenu brut qui excédait 300 millions de francs. Un certain nombre de compagnies levaient sur le public des trois royaumes, pour prix de la rapidité et de l’économie introduites dans les communications, un tribut qui est déjà presque égal et qui ne tardera pas à être supérieur au revenu de l’une ou de l’autre, des deux grandes puissances qui se disputent le gouvernement de l’Allemagne.

L’aisance, dont jouit le peuple anglais depuis la suppression des