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pensées, on entend retentir et des hymnes de guerre et des cris de patriotisme. Le colonel d’Arnebourg et M. de Waldeim, le piétiste absolutiste et le catholique féodal, s’unissent dans une même aspiration enthousiaste vers les destinées futures de l’Allemagne régénérée. M. d’Arnebourg va jusqu’à regretter que la guerre n’ait pas éclaté, en 1840. Quelle magnifique occasion ! On se croyait revenu aux jours ardens de 1813 ; la haine de la France était le lien qui aurait réuni toutes les forces divisées du pays ; l’Allemagne aurait réparé ses pertes, reconquis ses provinces perdues, et, dans cette renaissance du grand corps germanique, toute méfiance cessant entre les rois et les peuples l’unité allemande serait. Née sans peine du patriotisme et de l’enthousiasme de tous ! Moins animé par la haine de la France, moins confiant dans les résultats de la guerre, M. de Wadheim est persuadé que la paix, une paix intelligente et mise à profit par un roi comme celui qu’il appelle, peut seul produire de grandes choses. Il est vrai qu’il ne compte pas sur l’état tel qu’il est organisé aujourd’hui : absolutisme bureaucratique, régime constitutionnel, c’est tout un et ni l’un ni l’autre de ces gouvernemens, avec les stériles moyens dont il dispose, n’est en mesure de donner satisfaction aux désirs qui passionnent l’Allemagne. Sur qui donc compte-t-il ? Sur les forces de l’opinion, sur ces forces qu’il méprisait tout à l’heure et à qui il refusait la moindre place dans l’organisation générale ; il compte sur de grands faits impossibles à prévoir, sur des événemens capables d’enflammer les ames et d’y réveiller les inspirations généreuses. « Dieu merci ! s’écrie il, nous avons encore des sentimens communs ; nous tenons tous du fond de nos entrailles à l’honneur, à la dignité, à la prospérité de la grande patrie. Les sectes religieuses, ou politiques n’ont pas détourné ces saintes inspirations à leur profit. C’est en elles, et aujourd’hui peut-être plus que jamais, que l’aristocrate, le libéral, le radical, le communiste, le catholique, le vieux luthérien, le frère morave, le rationaliste et le panthéiste se sentent unis par des liens fraternels. Voilà donc le terrain neutre, voilà le sûr fondement où peut être construire l’édifice de l’unité.- Mais qui le construira ? — La diète, reprend M. de V aldheim, la diète, seul représentant autorisé de tous les intérêts de la nation. Pourquoi faut-il qu’elle ait été jusqu’à présent si au-dessous d’une pareille tâche ! » Si M. de Waldheim traite la diète avec mépris, il n’a garde de formuler d’une manière précise les reproches qu’il se croit obligé de lui faire. Ce sont, comme toujours, des accusations vagues. Où sont les œuvres de la diète ? où sont ses créations, s’écrie-t-il encore ; mais il n’indique pas lui-même quelles créations il attendait de la haute magistrature fédérale. Sur deux points seulement, ses paroles deviennent plus explicites ; dans l’ordre des intérêts matériels, il regrette que la diète n’ait pas établi pour l’Allemagne