à se retirer avec sa famille et une partie de ses fidèles vers la porte de Zaatcha, dite porte de Farfar, le seul point qui ne fût pas encore attaqué, et là il se renferma dans la maison de Ali-ben-Azoug, notre ancien cheik. Il était réservé au commandant de Lavarande, chef du 2e bataillon de zouaves, qui a joué un rôle si brillant dans cette action, de s’en rendre maître. Après être monté par la brèche, au lieu de suivre la tête de sa colonne, il avait pris à droite et s’était dirigé le long des remparts ; du côté de la porte de sortie. Dans une des maisons dont il avait dû s’emparer sur son passage, deux Arabes parlant français avaient été faits prisonniers. M. de Lavarande, qui cherchait avant tout la demeure de Bou-Zian, leur promet la vie sauve, s’ils veulent : lui servir de guide pour arriver à la retraité de leur chef. Le premier refuse noblement en disant qu’il aimait mieux mourir ; il est aussitôt massacré par les zouaves ; le second y consent, et indique la maison où Bou-Zian avait dû se retirer. M. de Lavarandey y dirige sa troupe qui est reçue par une fusillade terrible. La demeure était défendue par de nombreux et d’intrépides fanatiques. Les zouaves commencèrent d’abord l’attaque en cherchant à escalader la terrasse et en s’aidant des maisons voisines ; ils ne purent réussir. On essaya de braquer une pièce de montagne contre la muraille ; les canonniers étaient tués pendant la manœuvre ; les coups ne produisaient d’ailleurs aucun effet. On eut recours alors à la mine. Un sac à poudre fortement chargé est apporté par les soldats du génie ; mais, pour y mettre le feu, la mort était certaine. Les premiers qui se présentent pour allumer la mèche sont tués. Enfin un sous-officier du génie, aussi intrépide et plus heureux que les autres, réussit, la mine éclate, fait sauter avec fracas une portion du mur, et laisse à découvert devant les coups de l’assiégeant environ cent cinquante hommes et femmes ! les zouaves n’hésitent pas. Enivrés par le feu du combat, ils tirent sur ces malheureux entassés comme sur un troupeau effaré, puis se précipitent avec la baïonnette pour en finir.
Il y eut ensuite un moment d’attente. Un Arabe d’un extérieur et d’une attitude qui révélaient le chef apparut, sortant d’un des coins obscurs de la maison. Il était blessé à la jambe et s’appuyait sur un des siens. Sa main tenait un fusil, qu’il présentait à ses ennemis. Voilà Bou-Zian, s’écria le guide. Aussitôt le commandant se jeta sur lui et empêcha ses soldats de faire feu. « Je suis Bou-Zian, » telle fut la seule parole du prisonnier, puis il s’assit à la manière arabe et se mit à prier. M. de Lavarande lui demanda où était sa famille. Sur sa réponse, il envoya l’ordre de la sauver ; mais il était trop tard : déjà sa mère, sa femme et sa fille avaient été mises à mort, victimes de la fureur des zouaves, qui s’étaient introduits dans toutes les pièces et en avaient passé les habitans au fil de l’épée. La fille de Bou-Zian, que sa beauté aurait dû faire épargner, ne put donc être sauvée, pas plus que les autres femmes