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Italie. Les nombreux élèves qu’il avait formés, et les élèves de ceux-ci perpétuèrent jusqu’au commencement du XVIIe siècle la manière du maître, et la propagèrent dans les pays voisins. Nous avons dit la révolution que leurs travaux opérèrent dans l’art allemand : on verra plus loin l’art français subir à son tour l’influence italienne, tandis qu’une école dont il est temps de parler, l’école de gravure des Pays-Bas, participait avec plus de réserve au mouvement qui s’accomplissait autour d’elle, et semblait vouloir surtout s’inspirer de ses propres exemples.


IV. – ÉCOLE DES PAYS-BAS – LUCAS DE LEYDE : l’Adoration des Mages, le Calvaire, l’empereur Maximilien – Graveurs de l’école de Rubens - Rembrandt : la Résurrection de Lazare, le Christ guérissant les malades, les Disciples d’Emmaüs.

L’histoire de la gravure dans les Pays-Bas ne peut dater que des ouvrages de Lucas de Leyde, né en 1494. À cette époque, où les graveurs italiens et allemands s’étaient signalés déjà par l’éclat de leurs travaux, la Flandre et la Hollande n’avaient produit encore que quelques imagiers sur bois dont les noms et les œuvres seraient tout au plus dignes aujourd’hui d’un intérêt archéologique : Lucas de Leyde, le premier, mania le burin en artiste. À peine sorti de l’enfance, il avait mérité par son talent de peintre une grande renommée, et le tableau en détrempe de l’Histoire de saint Hubert, qu’il fit, dit-on, à douze ans, le plaça d’abord parmi les maîtres de son temps ; six ans plus tard, la publication de ses estampes le mit au premier rang. Il s’y maintint jusqu’à la fin de sa vie, et si plus tard les graveurs flamands et hollandais perfectionnèrent l’art dans leur pays, ils ne firent cependant que suivre les traces de Lucas de Leyde, et puiser plus abondamment à la source qu’il avait découverte.

Ce qui caractérise en effet les œuvres de Lucas de Leyde et en général toutes celles de l’école, c’est un vif sentiment des phénomènes produits par la lumière. Albert Dürer, Marc-Antoine lui-même, avaient méconnu ou dédaigné cette partie essentielle de l’art : à peine dans leurs travaux une légère dégradation des tons indique-t-elle la perspective aérienne, et l’on pourrait citer telle estampe de ces maîtres où les objets relégués au dernier plan sont aussi précis que les objets qui figurent au premier. Lucas de Leyde conçut l’idée d’affaiblir sensiblement les teintes en raison des distances, de donner aux ombres, suivant le cas, plus de transparence ou d’intensité ; en un mot, il fut le véritable inventeur de la science du clair-obscur, pour nous servir du mol que l’usage a consacré. Un calcul si juste, puisqu’il avait pour base les exemples mêmes de la nature, fut la cause principale des succès de Lucas. Toutefois des qualités d’un autre ordre s’ajoutent, dans les planches qu’il a laissées, au mérite de cette innovation, et l’expression variée