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une proclamation véhémente, et les journaux géorgiens se sont faits les échos de ses violences, et ont prononcé le mot de séparation. Le général Quitman, gouverneur du Mississipi, a été contraint par les réclamations de la presse locale de convoquer extraordinairement les deux chambres de l’état, pour qu’elles puissent examiner les mesures votées par le congrès. Le gouverneur de l’Alabama, en butte aux mêmes réclamations, va être contraint également de réunir la législature ; mais ce sont là des démonstrations plus bruyantes que dangereuses. Les partisans des mesures extrêmes veulent se ménager l’occasion d’attaquer à la tribune les auteurs du compromis ; cependant personne ne doute qu’après cette dernière satisfaction donnée à leurs passions et à leurs rancunes, toutes les opinions ne se réunissent pour accepter la transaction. Aussi les journaux les plus pessimistes ne témoignent-ils aucune inquiétude de ces dernières étincelles d’un feu déjà éteint.

C’est cette heureuse conclusion de tous leurs débats politiques qui a fait aux Américains des loisirs imprévus et leur a permis de recevoir Jenny Lind avec cet enthousiasme dont on nous a transmis les effusions naïves et souvent ridicules. Disons toutefois à l’honneur des Américains que ce qu’ils fêtent ainsi, ce n’est pas un talent qu’ils n’ont point encore apprécié, c’est la réputation intacte, la piété sans ostentation, la libéralité charitable ; c’est la grande cantatrice demeurée simple et pure, la femme célèbre n’ayant point vu dans son talent et dans sa renommée l’excuse du désordre et le droit de la souillure. C’est ce côté moral qui relève et qui permet d’excuser jusqu’à un certain point ces ovations continuelles, ces adulations sans mesure prodiguées par des villes entières à une femme ou pour mieux dire à une voix. Pourquoi reprocher aux Américains d’entourer une chanteuse de tant d’hommages ? Eux du moins ne se sont encore montrés ingrats pour aucun de leurs grands hommes, pour aucun des bons serviteurs de leur pays. Ailleurs on fête, on enrichit tout autant les baladins, et on envoie les hommes utiles en exil ou à l’hôpital.

ALEXANDRE THOMAS.


Le travail de M. de Montalivet, le Roi Louis-Philippe et sa Liste civile, publié dans notre dernier n°, a produit une vive sensation dans le pays, et presque tous les journaux français et étrangers s’en sont occupés. Nous recevons, à ce sujet, de M. Napoléon Bonaparte, représentant du peuple, une lettre que nous ne faisons aucune difficulté d’insérer, mais en l’accompagnant d’une réponse de M. de Montalivet, à qui nous avons cru devoir communiquer la réclamation de M. Napoléon Bonaparte.


À MONSIEUR LE RÉDACTEUR EN CHEF DE LA REVUE DES DEUX MONDES.

Paris, le 11 octobre 1850.

Monsieur le rédacteur,

Je n’ai lu qu’aujourd’hui la publication faite par M. de Montalivet dans votre Revue sur Louis-Philippe et sa Liste civile.