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de qui le Texas pût espérer un secours efficace. C’en était assez cependant pour rendre une lutte sanglante inévitable, et, une fois le signal de la guerre civile donné, tous les états à esclaves pouvaient se trouver entraînés par un mot, par une imprudence à prendre parti contre le nord. Aussi, à Washington, le président, les ministres, tous les hommes éminens des deux partis, tous les sénateurs qui avaient voté la transaction, réunirent-ils leurs efforts pour arracher aux représentans une décision qui permît au pouvoir exécutif de parler désormais au nom de l’Union tout entière, au nom du congrès, et de prendre des mesures assez énergiques pour faire reculer les autorités du Texas. Il fallait mettre celles-ci en présence non plus d’un projet de compromis, mais d’une transaction accomplie, en face non pas du président défendant un pacte que la moitié du congrès était prête à déchirer, mais en face des représentans de tous les états ; il fallait que le Texas se vît seul contre les vingt-neuf autres états : autrement un seul coup de fusil échangé sur la frontière du Nouveau-Mexique pouvait mettre la confédération en feu.

Sous le coup de cette impérieuse nécessité, les représentans consentirent enfin à écouter la voix de la raison et à annuler tous leurs votes antérieurs. Quand cette nouvelle se répandit dans Washington, la ville s’illumina spontanément, des salves d’artillerie furent tirées par les milices, et une foule immense se porta aux flambeaux sous les fenêtres des hommes qui avaient prêté au compromis le secours de leur éloquence. M. Clay, M. Webster, M. Cass, furent appelés par mille voix et salués des plus retentissantes acclamations. Ces démonstrations bruyantes se sont renouvelées dans toutes les grandes villes de l’Union, et la satisfaction populaire s’est partout manifestée avec une unanimité qui prouve combien étaient grandes les appréhensions de tous les bons citoyens.

À peine votés par la chambre des représentans, les quatre bills qui composent le compromis ont reçu la sanction présidentielle. M. Millard Fillmore a adressé aux autorités du Texas une communication énergique, les invitant à user de leur influence pour faire accepter par la législature texienne les décisions du congrès, et menaçant d’une répression immédiate toute tentative de résistance à des mesures qui étaient devenues la loi du pays. Il a écrit en même temps au colonel Monroe que, le Nouveau-Mexique étant désormais au territoire régulièrement constitué, il abandonnât sans conteste le pouvoir civil aux autorités électives. Quelques jours après, les sénateurs nommés, il y a six mois, par la Californie prenaient séance au sénat, et le congrès, fatigué de tant de luttes, fixait au 30 septembre la date de sa séparation.

On ignore encore quel accueil la législature texienne réserve aux décisions du congrès ; mais le général Samuel Houston, qui, après avoir fondé l’indépendance du Texas, est aujourd’hui le représentant de cet état au sein du sénat américain, et qui a pris une part active au vote du compromis, s’est engagé à employer son influence toute-puissante pour faire accepter à ses compatriotes l’équitable transaction que lui-même a consentie en leur nom. Quelques lettres annoncent même que la première effervescence des députés texiens s’est déjà apaisée, et que les plus ardens ne sont pas éloignés de prêter l’oreille à la conciliation. Quelques-uns des états du sud sont encore le théâtre d’une regrettable agitation. Le gouverneur de la Georgie a publié contre le compromis