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de la force publique un gendarme de plus, et l’allocation à faire aux prisons s’accroîtra de tout ce que l’on aura retranché à l’entretien des églises.

M. Pelletier attribue 70 millions au budget de l’agriculture et de l’industrie. Ce ne sera pas trop assurément sous le régime que ses anis et lui nous promettent. Quand on aura éteint l’énergie et dissipé les ressources individuelles, il faudra bien que l’état se charge de donner l’impulsion au travail, de l’éperonner et de le diriger. J’en dirai autant des 120 millions que M. Pelletier prétend consacrer annuellement aux travaux d’utilité publique. Dès qu’il n’existera plus de compagnies pour entreprendre une partie de ces travaux, la part de l’état s’accroîtra naturellement de celle des associations. Il devra prendre la place qu’il aura rendue vacante, sans quoi, nous aurions le droit de lui dire : « Pourquoi nous priver de l’assistance des compagnies, si vous ne nous apportez pas quelque chose de mieux, ou tout au moins l’équivalent de ce qu’elles peuvent faire ? »

Dans les années qui ont précédé 1848, le budget extraordinaire des travaux publics s’élevait en moyenne à 150 millions ; et le budget ordinaire à 60 millions, à quoi venaient s’ajouter 90 ou 100 millions dépensés par les compagnies. Au total, l’exécution ou l’entretien de ces grands ouvrages répandait annuellement dans le pays une somme de 300 millions[1], qui s’écoulait en paiement des matériaux et de la main-d’œuvre. En 1848, la dépense des travaux publics, malgré les embarras de nos finances, a excédé 200 millions. Aujourd’hui elle est encore de 150 millions pour l’état et pour les compagnies ; ce qui n’empêche pas que les grandes industries souffrent et se plaignent. Comment veut-on donner satisfaction à tous ces intérêts en diminuant de plus belle le travail et la dépense ? M. Pelletier fera bien d’augmenter ce chapitre de 75 à 80 millions, à moins qu’il ne se résigne à voir surgir encore une fois la fatale excroissance des ateliers nationaux.

J’arrive à une allocation qui touche de bien près au ridicule ; il s’agit de 7 millions consacrés aux affaires internales et communales. Voilà l’article par lequel M. Pelletier remplace le budget de l’intérieur. Le réformateur socialiste nous permettra de lui dire qu’il fait trop ou trop peu : trop, s’il veut conserver une action quelconque au pourvoir central ; trop peu, s’il prétend relâcher tous les liens administratifs et détruire tous les moyens de gouvernement.

Sur les 122 millions que comprend le budget de l’intérieur, 94 millions, produit de ressources spéciales, sont consacrés au service départemental. Sur les 28 millions qui sont ordonnancés directement par

  1. En 1847, l’état a dépensé en travaux extraordinaires 177 millions, et les compagnies plus de 120 millions.