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savoir ceux de Berne, Zurich, Vaud, Saint-Gall, Argovie et Grisons, avaient chacun deux voix ; les autres n’en avaient qu’une. Les déclarations de guerre et les traités de paix ou d’alliance émanaient de la diète ; elle seule pouvait conclure des traités de commerce et des capitulations pour le service militaire à l’étranger, elle déterminait le contingent de troupes à fournir par chaque canton, nommait le général de l’armée ainsi recrutée, et prenait d’ailleurs toutes les mesures nécessaires pour la sûreté de la Suisse ; elle nommait aussi les ambassadeurs.

Cette médiation, ouvre du premier consul, si favorable à la Suisse n’avait qu’un seul côté faible : c’était en apparence une œuvre purement française à laquelle les autres puissances n’avaient nullement participé, et qui semblait faire dépendre l’acte de médiation de la position personnelle de Napoléon. Le premier consul aurait pu éviter cette apparence en s’entendant avec l’Autriche au sujet de la Suisse, sans renoncer pour cela à l’œuvre de la médiation en elle-même. Il négligea cette précaution, et onze ans plus tard, à la fin de 1843, l’acte de médiation ne fut pas respecté par l’Europe, lorsqu’elle marcha contre l’empire.

La nouvelle organisation, le pacte fédéral que la Suisse se donna en 1815 après le renversement de l’acte de médiation, eut pour caractère particulier le développement de la souveraineté des cantons aux dépens de tout pouvoir et de tout intérêt fédéral. L’acte de médiation avait aboli les privilèges politiques ; le nouveau pacte se borna à déclarer que les droits politiques ne seraient plus le partage exclusif d’une classe de citoyens. Aussi les bourgeois et les patriciens des anciens cantons, qui en avaient été autrefois les souverains, reprirent-ils plus ou moins leur influence souveraine dans l’état. Le premier article du nouveau pacte faisait mention de la souveraineté cantonale sans parler de la souveraineté fédérale corrélative ; il se taisait sur la responsabilité des autorités cantonales vis-à-vis de la confédération. L’interdiction prononcée par l’acte de médiation contre les alliances particulières des cantons était remplacée par une disposition assez vague qui défendait aux cantons de former entre eux des liaisons préjudiciables au pacte fédéral ou aux droits d’autres cantons. Plusieurs des dispositions de l’acte de médiation qui avaient eu pour but d’unir peu à peu les intérêts matériels furent écartées ; la confédération renonça même à surveiller et à décider les questions monétaires. La dignité du landamman de la Suisse, revêtu de pouvoirs spéciaux, représentant les intérêts fédéraux et chargé de les protéger, fut supprimée. La direction des affaires générales, dans les intervalles où la diète n’était pas réunie, fut confiée aux gouvernemens particuliers de Zurich, Berne et Lucerne, et dut alterner de deux en deux ans entre ces trois cantons. Il y avait là matière à des contestations de tout genre