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premier cas, l’impétuosité des vents et l’insuffisance de nos moyens mécaniques, dans le second la même cause unie à l’impossibilité d’employer l’aiguille aimantée comme instrument d’orientation dans les airs, où l’aérostat ne trace aucun sillage, sont autant d’insurmontables obstacles opposés à la solution du problème de la direction des ballons. Les divers essais auxquels ce problème a donné lieu méritent pourtant d’être exposés et discutés rapidement.

Monge proposa, comme appareil de direction des aérostats, un système de vingt-cinq petits ballons sphériques attachés l’un à l’autre comme les grains d’un collier, formant un assemblage flexible dans tous les sens et susceptible de se développer en ligne droite, de se courber en arc dans toute sa longueur ou seulement dans une partie de sa longueur, et de prendre avec ces formes rectilignes ou ces courbures la situation horizontale ou différens degrés d’inclinaison. Chaque ballon devait être muni de sa nacelle et dirigé par un ou deux aéronautes. En montant ou en descendant, suivant l’ordre transmis au moyen de signaux par le commandant de l’équipage, ces globes auraient imité dans l’air le mouvement du serpent dans l’eau. Ce projet étrange n’a point été mis à exécution.

Meunier a traité plus sérieusement le problème des aérostats. Le travail mathématique qu’il a exécuté en 1785 sur toutes les questions qui se rattachent à l’aérostation est encore aujourd’hui ce que l’étude des difficultés de la navigation aérienne a produit de plus complet et à plus raisonnable. Meunier voulait employer un seul ballon de forme sphérique et d’une dimension médiocre. Ce ballon se trouvait revêtu à l’extérieur d’une seconde enveloppe destinée à contenir de l’air comprimé. À cet effet, un tube faisait communiquer cette enveloppe avec une pompe foulante placée dans la nacelle ; en faisant agir cette pompe on introduisait entre les deux enveloppes une quantité d’air atmosphérique dont l’accumulation augmentait le poids du système et donna ainsi le moyen de redescendre à volonté. Pour remonter, il suffisait de donner issue à l’air comprimé ; le poids du ballon s’allégeait, et le ballon regagnait les couches supérieures. Ni lest ni soupape n’étaient donc nécessaires, ou plutôt les navigateurs avaient toujours ce lest sous main, puisque l’air atmosphérique en tenait lieu. Quant aux moyens de mouvement, Meunier comptait surtout sur les courans atmosphériques : en se plaçant dans leur direction, on devait obtenir une vitesse considérable ; mais, pour chercher ces courans et pour s’y rendre, il faut un moteur et un moyen de direction. Meunier avait calculé que le moteur le plus avantageux, c’étaient les bras de l’équipage. Quai au mécanisme, il employait les ailes d’un moulin à vent qu’il multipliait autour de l’axe, afin de pouvoir les raccourcir sans en diminuer la superficie totale ; il leur donnait une inclinaison telle qu’en frappant