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l’intérieur. Aussi la décision fut-elle prise à l’instant, et l’on désigna pour exécuter l’ascension MM. Biot et Gay-Lussac, qui étaient les plus jeunes et les plus ardens professeurs de l’époque. Conté se chargea de construire et d’appareiller l’aérostat. Les dispositions qu’il prit pour rendre le voyage aussi sûr que commode ne laissaient rien à désirer. Aussi, le jour fixé pour l’ascension, les deux académiciens n’eurent qu’à se rendre au jardin du Luxembourg et à monter dans la nacelle munis de leurs instrumens. Cependant, au moment du départ, il survint un petit accident qui nécessita l’ajournement du voyage. L’aérostat s’était trouvé plus tôt prêt que les aéronautes, et ceux-ci crurent pouvoir sans danger le faire attendre ; mais les piquets auxquels étaient fixées les cordes qui le retenaient étaient plantés sur un terrain récemment remué et par conséquent peu solide ; une pluie abondante, tombée pendant la nuit, l’avait détrempé, de sorte que les piquets ne purent résister à la force ascensionnelle de l’aérostat. En arrivant au Luxembourg, MM. Biot et Gay-Lussac furent tout surpris de voir le ballon en l’air et un grand nombre de personnes occupées à ramener le fugitif. Heureusement on put saisir ses lisières, et on le ramena sur le sol. On dut néanmoins remettre l’ascension à un autre jour et choisir un local plus convenable. On se décida pour le jardin du Conservatoire des Arts-et-Métiers, et c’est de là que MM. Biot et GayLussac partirent le 20 août 1804, pour accomplir la plus belle ascension scientifique qu’on ait encore vue.

Le but principal de cette ascension était d’examiner si la propriété magnétique éprouve quelque diminution appréciable quand on s’éloigne de la terre. L’observation très-attentive à laquelle ils soumirent, pendant presque toute la durée du voyage, les mouvemens de l’aiguille aimantée, amena les deux savans à conclure que la propriété magnétique ne perd rien de son intensité quand on s’élève dans les régions supérieures de l’air. À quatre mille mètres d’élévation, les oscillations de l’aiguille aimantée coïncidaient en nombre et en amplitude avec les oscillations reconnues à la surface de la terre. Les courageux observateurs expliquèrent l’erreur dans laquelle, selon eux, Robertson était tombé par la difficulté que présente l’examen de l’aiguille aimantée, sous l’influence des oscillations de l’aérostat. Ils constatèrent aussi, contrairement aux assertions de Robertson, que la pile de Volta et les appareils d’électricité statique ne fonctionnent pas moins bien à une grande hauteur dans l’atmosphère qu’à la surface du sol. L’électricité qu’ils recueillirent était résineuse, et sa quantité s’accroissait avec la hauteur. L’observation de l’hygromètre leur fit découvrir que la sécheresse croissait également avec l’élévation. MM. Biot et Gay-Lussac firent différentes observations thermométriques, mais qui ne furent pas suffisantes pour en tirer quelque conclusion rigoureuse