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finances était parvenu à dresser un budget qui ne présentait, tous les engagemens de l’état remplis, qu’un très faible déficit moyennant une réduction de dépenses de 100 millions de réaux. Cette réduction débattue au conseil, l’accord s’est trouvé à peu près unanime sur le chiffre de 95 millions. Cette différence de 5 millions de réaux a paru à M. Bravo-Murillo devoir détruire l’édifice de ses combinaisons financières, et il s’est retiré plutôt que de céder aux considérations que faisaient valoir auprès de lui ses collègues, — considérations basées sur l’intérêt des services publics. C’est, comme on le voit, une crise ministérielle pour peu de chose. M. Bravo-Murillo s’est exprimé d’ailleurs avec beaucoup de convenance dans la séance du congrès où il a expliqué cette situation. Le général Narvaez a pu seulement lui faire observer combien il était facile à un ministre de devenir un héros pour l’opposition : il n’a qu’à se retirer, et ce n’est pas le seul point où le président du conseil a eu spirituellement raison. Le général Narvaez a mieux fait que de se défendre avec esprit : il a montré un grand sens, quand il a dit que si, toutes les fois qu’un ministre propose un plan quelconque, il faut absolument que ce plan soit adopté par ses collègues sans discussion dans ses moindres détails, ou que le ministre se retire, les crises devront infailliblement se succéder et retarder la fondation d’un pouvoir stable et fort. Chaque ministre ne doit-il pas faire quelques sacrifices particuliers à la pensée générale qui anime un cabinet ? Le général Narvaez était là dans la vérité la plus élémentaire du gouvernement constitutionnel.

À vrai dire, la manière dont cette question s’est introduite au congrès n’était pas faite pour lui donner beaucoup de sérieux et d’importance ; c’est le général Prim qui l’a élevée à la hauteur d’un débat parlementaire. Le jeune général prend trop volontiers peut-être pour des motifs politiques les raisons particulières qui lui font désirer la chute du général Narvaez. Avec cette impatience, on procure à ses adversaires de faciles victoires comme celle qu’a obtenue le duc de Valence, car il n’en est pas même résulté de vote. Que reste-t-il au bout de cette crise accidentelle et des explications données au congrès ? Quelque mystère qu’on ait voulu soupçonner dans un fait bien simple en lui-même, il faut en revenir au vrai : c’est que rien n’est changé dans la politique de l’Espagne, même en ce qui touche les finances. Le cabinet espagnol demeure avec la même pensée de stricte économie dans les dépenses publiques, avec la volonté formelle et déclarée de satisfaire à toutes les obligations de l’état sans nouveaux impôts. Déjà le budget de 1851 doit être présenté à l’heure où nous écrivons. Si, comme tout le fait présumer, M. Mon est prochainement appelé à rentrer au ministère des finances, ce sera incontestablement une force nouvelle, un élément nouveau de durée pour le cabinet du général Narvaez.

ALEXANDRE THOMAS.
LES NOUVELLES ACQUISITIONS DU MUSEE.

Le Musée vient de dépenser à la vente du feu roi de Hollande une somme de 103,000 francs. Cette somme a-t-elle été utilement employée ? Les œuvres choisies dans la collection de La Haye par MM. Reiset et Villot doivent-elles ajouter une valeur nouvelle à la galerie du Louvre, qui se recommande déjà