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les graveurs-paysagistes qu’il forma devinrent presque aussitôt les maîtres du genre. On a nommé déjà Balechou et Vivarès : le premier élève d’abord de Lépicié, avait commencé par graver des portraits, dont le plus connu, le portrait en pied du roi de Pologne Auguste III, attira sur l’auteur la honte d’une punition méritée. Convaincu d’avoir détourné un certain nombre des premières épreuves pour les vendre à son profit. Balechou fut rayé de la liste des membres de l’Académie, et obligé de se retirer à Arles, sa ville natale, puis à Avignon, où il s’adonna uniquement au paysage. Ce fut là qu’il fit, d’après Joseph Vernet, ses estampes des Baigneuses, du Calme et de la Tempête. Dans ses dernières années, il revint à la gravure d’histoire, et exécuta, d’après Carle Vanloo, cette Sainte Geneviève si estimée de quelques amateurs, et qui serait en effet un chef-d’œuvre, si la souplesse du burin et la facilité de la manœuvre pouvaient dispenser de la correction. Quoiqu’il n’ait pas, comme Vivarès, enseigné lui-même la gravure de paysage en Angleterre, Balechou contribua puissamment par ses œuvres à instruire les artistes de ce pays, et le plus habile d’entre eux Woollett, avouait qu’il avait sous les yeux une épreuve de la Tempête, lorsqu’il travaillait à sa planche de la Pêche. Quant à Vivarès, après avoir produit à Paris, d’après Joseph Vernet et les anciens maîtres, quelques estampes justement admirées, il alla se fixer à Londres, où se rendirent aussi mais un peu plus tard, Barret, Loutherbourg et beaucoup d’autres Français. Il y importa un nouvel art, comme avait fait Hollar plus d’un siècle auparavant, et fonda cette école de graveurs-paysagistes dont les talens sont encore aujourd’hui la gloire principale de la gravure anglaise.

Cependant, avant que les élèves de Vivarès prissent à sa suite possession de ce vaste domaine, deux artistes remarquables, Hogarth et Reynolds, avaient honoré l’Angleterre, et, sous leur direction, la gravure s’était considérablement développée dans une autre voie. Fils d’un prote d’imprimerie qui l’avait mis en apprentissage chez un ciseleur de vaisselle, William Hogarth passa presque toute sa jeunesse dans l’obscurité et la misère. À vingt ans, il gravait des cartes d’adresse pour les marchands de Londres ; à vingt-cinq, il peignait des enseignes de boutique et se consumait dans des occupations indignes de lui, lorsqu’il attira l’attention publique par la mise au jour d’une estampe satirique, où figuraient des personnages aisément reconnaissables. De nombreuses compositions de même sorte parurent ensuite et confirmèrent le succès ; Hogarth en profita pour produire son talent dans des travaux plus sérieux. En peu de temps, il acheva de se faire connaître, s’enrichit par son mariage avec la fille de sir James Thornhill, peintre du roi, et demeura jusqu’à la fin de sa vie (1764) l’un des hommes les plus renommés de son pays. Peintre et graveur, Hogarth