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moment, et après sept mois de luttes acharnées, une mesure que tout le monde regardait comme indispensable au salut de l’Union. L’approbation donnée au contraire au message du nouveau président et à ses protestations énergiques en faveur du maintien de la confédération a fait réfléchir les sénateurs. Plusieurs d’entre eux ont repris en leur nom personnel et comme mesures détachées les diverses parties de la proposition de M. Clay. Déjà deux de ces propositions, celle qui règle les frontières futures du Texas et du Nouveau-Mexique et celle qui admet la Californie au sein de la confédération, ont été adoptées par le sénat. Si les motions relatives à l’organisation politique des territoires et aux esclaves fugitifs triomphent également, le compromis de M. Clay se trouvera réalisé dans toutes ses parties, et le grand orateur n’aura point inutilement dépensé son éloquence et ses efforts.




LE BUDGET DE LA TURQUIE[1].


La Turquie est entrée dans une phase de calme et de paix que l’on aurait peut-être remarquée en des temps où l’attention de l’Europe eût été plus libre. Si l’on excepte le mouvement de la Moldo-Valachie qui est un pays absolument occidental par ses idées, il n’est rien survenu, depuis deux ans, dans l’empire ottoman qui ressemble aux agitations révolutionnaires naguère encore si fréquentes sur ce terrain, car il est impossible de prendre au sérieux les troubles si promptement réprimés qui ont un instant inquiété la Bosnie et la Bulgarie. L’empire turc est resté en paix au moment même où des insurrections formidables ensanglantaient les pays voisins : les seules difficultés graves qu’il ait eues à traverser lui sont venues du dehors, et, par une faveur qu’il doit à l’énergie autant qu’à la prudence des hommes qui le gouvernent, il en est, heureusement sorti. Le divan peut donc aujourd’hui reprendre en toute liberté l’œuvre de progrès à laquelle la conservation de l’empire est attachée.

Si la race ottomane n’a point montré jusqu’à ce jour l’impatience du mieux qui distingue les autres peuples de l’Europe, et principalement les races latines, elle n’est pas cependant courbée autant qu’on le pense sous le joug d’une fatalité aveu-le, attendant le bien des seuls caprices du hasard et du temps. Elle comprend mieux les conditions de l’existence politique ; elle commence à sentir que Dieu a voué l’homme à l’effort, et que la vie est désormais au prix du travail, comme, au temps des conquêtes, elle était au prix du courage. L’instinct du commandement n’a jamais manqué aux Osmanlis ; mais ils ont bien rarement laissé voir le goût et la science de l’administration, et ce n’était pas une médiocre entreprise que de détruire, chez ces peuples accoutumés à vivre sous la tente, leur répugnance native pour la tâche de l’économiste et de

  1. Bien que le gouvernement turc, à l’exemple des gouvernemens constitutionnels, publie depuis quelques années un Annuaire officiel, son budget est encore un secret d’état. Les renseignemens que nous donnons sur cette partie de l’administration ottomane, dus à une personne bien placée pour les recueillir aux meilleures sources, pourront, nous le croyons, servir à éclairer le divan lui-même sur les besoins et les ressources de la Turquie.