et portant à l’excès les passions de parti. M. Clayton avait partagé toutes les hautes fonctions entre ses amis personnels ; il avait systématiquement éloigné et blessé tous les hommes considérables qui font la force des whigs, et le gouvernement s’était trouvé à peu près sans défenseurs dans les chambres. M. Fillmore a composé lui-même son ministère, et y a appelé les hommes les plus distingués et les plus influens de son parti. Parmi eux, il en est deux qui méritent une mention particulière : le premier est M. Webster, qui a déjà plusieurs fois rempli le poste de ministre des affaires étrangères, qui s’est signalé par des négociations difficiles, et qui est après M. Clay le premier orateur des États-Unis. Le second est M. Crittenden, qui a représenté le Kentucky au sénat, et qui était gouverneur de cet état quand M. Fillmore l’a appelé au poste d’avocat-général. M. Crittenden est un homme instruit et actif, versé dans la pratique des affaires et dans le maniement des hommes, et il n’est personne qui exerce sur son parti une plus grande et plus légitime influence. La composition du nouveau cabinet qui ne réunit que des hommes d’une grande notoriété, d’une probité et d’une capacité incontestables, a rencontré l’approbation générale. L’administration de M. Fillmore aura à combattre une vive opposition de la part des démocrates ; mais ce ne sont ni les lumières, ni l’unité, ni la vigueur qui lui manqueront dans cette lutte.
Au moment où M. Fillmore prenait possession du pouvoir, le gouverneur du Texas lançait une proclamation qui était un signal de guerre civile. On sait que le Texas réclame comme lui appartenant une grande partie de la province du Nouveau-Mexique, cédée aux États-Unis par le traité de la Guadalupe, et qu’il y veut introduire l’esclavage. Les habitans du Nouveau-Mexique, presque tous d’origine espagnole et de sang mêlé, repoussent et l’autorité du Texas et l’établissement de l’esclavage. Pour échapper à tout danger, ils se sont récemment donné une constitution, et ont réclamé du congrès leur reconnaissance, sinon comme état, au moins comme territoire. Le Texas a regardé la promulgation d’une constitution au Nouveau-Mexique comme une violation de ses droits, comme une rébellion, et le gouverneur du Texas, dans une proclamation, a annoncé qu’il allait lever un corps de quinze cents hommes pour réduire par la force le Nouveau-Mexique à l’obéissance. Le président Fillmore a immédiatement adressé au congrès un message pour lui demander les moyens d’imposer au gouverneur du Texas le respect de la constitution. Avec une netteté et une fermeté auxquelles il faut rendre hommage, le président y rappelait que le Nouveau-Mexique avait été conquis par le sang de l’Union tout entière, et annonçait sa ferme résolution de maintenir l’intégrité du Nouveau-Mexique jusqu’à e que le congrès eût disposé souverainement de cette propriété fédérale.
Cet acte de vigueur a fait évanouir les velléités belliqueuses du Texas. Il a en outre exercé sur le sénat une influence salutaire. Cette assemblée, contre le vœu manifeste de l’opinion publique, venait de rejeter article par article le compromis présenté par M. Clay. Les coteries s’étaient prêté un mutuel appui pour que rien n’avait subsisté de ce bill qui avait pour objet de terminer toutes les questions en litige, en imposant à chaque parti des concessions raisonnables. Un vif mécontentement a été provoqué par cette conduite qui faisait échouer au dernier