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un écrivain brillant, M. Adolphe Stahr, vient de mettre en scène dans ses Républicains à Naples[1] les courtes et tragiques destinées de la république parthénopéenne, fondée en 1799 par l’ordre du directoire. Il est aisé de comprendre l’attrait de ces travaux ; historiens, romanciers et poètes, comment tous les écrivains sérieux ne chercheraient-ils pas à pénétrer par l’étude, à reproduire par les ressources de l’art ces émouvans épisodes d’une histoire qui nous touche de si près ? Il me paraît cependant que c’est à l’historien et au publiciste que convient une pareille tâche. Cette histoire nous touche de près, ai-je dit ; les plus hauts problèmes y sont engagés : c’est précisément pour cela qu’il faut y apporter un examen approfondi. L’imagination peut rendre ici de mauvais services, surtout si le roman ne prend pas la révolution pour cadre, mais prétend la raconter elle-même. Voyez l’ouvrage de M. Stahr : ce n’est pas un tableau vrai, c’est une apologie lyrique de la démocratie napolitaine à la fin du dernier siècle. Tous les personnages de M. Stahr sont des héros sans tache, des saints et des martyrs. Enivré par le ciel italien, par les merveilles du golfe de Naples, par les enchantemens de Baia et de Pausilippe, l’ardent écrivain, au lieu de nous raconter simplement ses impressions de voyage, a reporté sur les acteurs de son drame l’enthousiasme qui le possédait. Il a vu les démocrates italiens à travers les éblouissemens d’une nature splendide. Certes, un tel ouvrage se fait lire avec plaisir ; l’éclat du style, la générosité des sentimens, le dramatique intérêt qui s’attache à la destinée de ses martyrs, tout cela compose une œuvre assez remarquable ; qui ne préférerait cependant à la poésie souvent mensongère de ce tableau une étude plus intelligente de la réalité ? Que l’épopée idéalise les faits, rien de mieux : c’est le charme, c’est l’originalité du roman et de la comédie historique, de nous montrer, au milieu même des événemens les plus considérables, la part immense des lâchetés, des intrigues, des misères sans nombre de l’espèce humaine. Les révolutions surtout excitent plus souvent les mauvais penchans que les bons instincts des peuples, et il est rare qu’elles ne produisent pas cent coquins pour un héros. L’histoire présente aurait dû avertir M. Stahr ; cette glorification sans réserve de la démocratie italienne produit un singulier effet au lendemain d’une révolution qui a outragé Pie IX et assassiné Rossi.

Ce n’est pas à la révolution de 1789, c’est aux luttes intérieures de l’Allemagne sous l’impératrice Marie-Thérèse que se rattache un roman récent de M. Maurice Hartmann, la Guerre autour de la forêt[2]. Nous sommes en Bohême, et l’auteur a dépeint avec force la situation

  1. Les Républicains à Naples (Die Republikaner in Neapel), par Adolphe Stahr ; Berlin, 1849.
  2. Der Krieg um den Wald, von Moritz Hartmann ; Francfort, 1850.