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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 juillet 1850.

La révolution de février est-elle une catastrophe ? Voilà une des questions politiques de cette quinzaine, question toute rétrospective, comme on le voit, tout historique, et qui par conséquent nous intéresse peu. M. le ministre de la justice dit que la révolution de février est une catastrophe : il dit cela dans la discussion d’une des mille et une fois qu’on a faites et défaites sur la presse, et cela prouve suffisamment qu’il entend laisser à la presse une grande liberté sous le gouvernement républicain, celle, par exemple, de dire que la révolution de février est une catastrophe. Cette liberté nous suffit ; elle vaut toute la loi. La montagne, au contraire, crie de toute l’énergie de ses poumons que la révolution de février n’est pas une catastrophe, et, comme elle crie cela dans une discussion sur la presse, cela veut dire apparemment que dans la loi sur la liberté de la presse, comme l’entend la montagne, il ne sera pas permis de dire que la révolution de février est une catastrophe. La discussion des origines de la révolution de février sera interdite. Voilà le libéralisme de la montagne.

M. Ledru-Rollin était plus libéral : il appelait le 24 février un fait, et un fait qu’il aurait pu, disait-il, modifier et changer le 16 avril au profit d’un autre gouvernement, sans pour cela être coupable de violer aucun droit ; car jusqu’au 4 mai, c’est-à-dire jusqu’à la proclamation de la république par l’assemblée nationale, il n’y a eu en France depuis le 24 février qu’un gouvernement de fait et point de gouvernement de droit. Si M. Ledru-Rollin avait le droit de changer ce gouvernement de fait, à plus forte raison M. Rouher peut le juger.

La révolution de février n’est point une catastrophe ! Cela pourra devenir une maxime d’état ; mais cela aura de la peine à devenir un lieu commun et une opinion courante. Que voulez-vous, en effet, que pensent ce commerçant et ce manufacturier qui, avant 1848, faisaient de grandes et de bonnes af-