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Et ne croyez pas que la Kabylie soit à l’extrémité de notre empire algérien, près du désert. Non ! Elle est à la porte d’Alger, au sein même de nos possessions. « C’est une espèce de Suisse sauvage à notre porte. » Que dirait Paris si Montmartre et les buttes Saint-Chaumont étaient indépendantes et hostiles ? Cela le gênerait fort. Voilà à peu près l’effet que la Kabylie fait à Alger.

« Un tel état de choses est anormal, dit le général Yusuf ; la Kabylie avec son urbanisation actuelle est un échec moral pour nos armes en même temps qu’une immense perte pour la colonie… La guerre d’Afrique doit présenter trois périodes ; deux sont achevées. La première est marquée par la prise d’Alger sous l’ancienne monarchie : pendant la seconde, sous le roi Louis-Philippe, tout a été dompté. Le drapeau tricolore a flotté sur toute l’Algérie. La république doit achever l’œuvre commencée et menée presque à fin par deux dynasties emportées par l’orage. La conquête de la Kabylie mettra le sceau à l’œuvre. » Nous ne demandons pas mieux que la république fasse quelque chose en Afrique ; mais surtout nous demandons que la France y consolide et y affermisse son empire. La Kabylie ne peut pas rester en dehors de cet empire, et c’est à cette conquête qu’il faut s’attacher, si c’est une conquête à faire. Nous verrons, quant à nous, avec plaisir commencer en Algérie quelque chose d’important qui nous détourne de nos misères de l’intérieur.

La brochure du général Yusuf est dédiée à Mme la maréchale Bugeaud en quelques termes touchans et nobles qu’il faut nous permettre de citer. La mémoire des morts illustres est bonne et salutaire, et les hommages qui s’adressent à leur souvenir honore le cœur de l’homme. « Madame la maréchale, dit le général Yusuf, personne ne sera étonné que je vous dédie un livre intitulé la Guerre en Afrique. Votre nom même, justifie cet hommage. Tout ce que j’ai appris, tout ce que je sais comme soldat, c’est au maréchal Bugeaud que je le dois ; c’est à lui que j’aurais dédié cet ouvrage si l’a mort n’avait enlevé à la France son plus grand capitaine et un de ses plus grands citoyens. Je le dédie à sa veuve. Si votre fils doit entrer un jour dans la carrière des armes, permettez-moi d’espérer que vous lui mettrez sous les yeux ce livre où il trouvera à chaque page le souvenir de son père. Quant à vous, madame la maréchale, je n’ai qu’un vœu à former, c’est que vous y trouviez une nouvelle preuve de mon éternelle reconnaissance pour l’homme illustre sous les ordres duquel je suis fier d’avoir eu l’honneur de servir. »

Nous avions dit qu’il y avait dans le livre du général Yusuf bien des choses qui n’étaient pas seulement de la compétence d’un militaire. En voilà une, je crois, qui justifie notre remarque et qui va à l’adresse de tout le monde.



REVUE DES ARTS.




LE DESSIN SANS MAÎTRE par MMe Élisabeth Cavé.[1]

Voici la première méthode de dessin qui enseigne quelque chose. En publiant comme un essai le remarquable traité où elle développe avec un intérêt infini

  1. Un vol. in-8° chez Susse frères, 31, place de la Bourse.