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de Bienfait, dont les affaires, malgré tous ces mouvemens, et peut-être à cause de tous ces mouvemens, semblaient décliner. Nous trouvons, en effet, en 1750, cette triste annonce dans les affiches de Paris : « On fait savoir qu’en vertu d’une sentence du Châtelet du 14 novembre, il sera procédé à la vente et adjudication d’une loge construite dans la foire Saint-Laurent, avec ses appartenances et dépendances, saisie sur le sieur Bienfait. » Nous le retrouvons pourtant, lui ou les siens, dans les années suivantes, entre autres en 1752, faisant jouer par ses marionnettes une pièce anonyme, Arlequin au sabbat ou l’Ane d’or d’Apulée[1]. Son fils avait encore un théâtre de marionnettes en 1767, et même en 1773, à la foire Saint-Germain[2].

Il s’établit à Passy en 1760, sous le nom de Théâtre des Comédiens artificiels de Passy, un spectacle de marionnettes, dont le directeur, M. Cadet de Beaupré, eut la malheureuse idée de se faire le pourvoyeur littéraire. Il fit jouer par Polichinelle et dame Gigogne, et imprimer ensuite, un acte en vers intitulé les Philosophes de bois. C’était une parodie ou une contre-partie très effacée de la fameuse comédie de Palissot. L’auteur avoue dans une courte préface que sa pièce n’a eu aucun succès à la représentation, ce qui l’engage à en appeler à la lecture. Cet ouvrage est, je crois, tout ce.qui reste, si cela peut s’appeler rester, du répertoire des comédiens artificiels de Passy.


X. – LES BOULEVARDS. – FOIRE PERMANENTE.

Le rempart du Marais assaini dès 1737 par l’établissement du grand égout, un peu abaissé et planté, en 1768, de cinq rangées d’arbres, était devenu, sous le nom de boulevard du. Temple, une promenade aimée des habitans du quartier Saint-Antoine, de Popincourt et de la Grande-Pinte. Peu à peu, il s’éleva sur ce terrain fangeux des baraques où les bateleurs habitués des foires Saint-Germain ; Saint-Laurent et Saint-Ovide furent autorisés à établir une sorte de foire permanente, à la charge toutefois de se réinstaller, pendant la durée des foires périodiques, aux places qu’ils y occupaient précédemment, obligation à laquelle ils furent tenus de se soumettre jusqu’à la loi du 13 janvier 1791, qui proclama la liberté des spectacles[3].

Fourré fils, qui faisait danser, comme son père, des marionnettes aux diverses foires de Paris, fit, vers 1756, bâtir par Servandoni, dont il était élève, un petit théâtre sur le boulevard, où, indépendamment

  1. Je ne saurais dire si cette pièce était la même que l’opéra-comique composé par Piron sous le titre de l’Ane d’or d’Apulée pour la foire Saint-Laurent de 1721.
  2. Almanach forain, 1773 ; in-18.
  3. La foire Saint-Germain s’est ouverte jusqu’en 1793, comme on peut s’en assurer par les Affiches de Paris de mars 1793