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confédération germanique. C’est l’ancienne diète, qui reparaît ; c’est 1815 qui se relève en face de 1848, 1815 représenté par l’Autriche qui veut être libérale, dit-on, 1848 timidement soutenu par la Prusse qui ne veut pas être révolutionnaire, qui a pourtant accepté l’héritage d’une révolution, mais qui craint de faire acte d’héritier.

L’Espagne a failli avoir ces jours derniers, une seconde édition de la mystification Fulgencio-Patrocinio. Cette fois, heureusement, la monomanie anti-ministérielle d’un grand personnage n’a pas été contagieuse, et la jeune reine, si nous sommes bien informés, n’aurait pas été la dernière à témoigner son ennui des singulières obsessions dont elle était de nouveau l’objet. On parlait déjà d’assigner au royal agitateur la résidence de Ségovie, lorsque l’intervention de la reine-mère a amené une réconciliation générale Nous ignorons si les ames du purgatoire étaient cette fois de la partie ; mais, comme toujours, le confesseur du roi en était. Le ministère Narvaez agirait prudemment, ce nous semble, en exigeant le renvoi définitif de ce nouveau père Nithard. Les royaumes, dans le siècle où nous vivons, n’ont déjà que trop de dangers sérieux à combattre pour qu’il faille y joindre gratuitement le plus sérieux de tous, le ridicule ; et comment n’être pas tenté de sourire de l’étrange condescendance de ce royal pénitent se faisant, de bonne foi l’agent d’une intrigue montémoliniste conspirant lui-même contre le trône où il est assis ? Le cabinet Narvaez parait du reste plus inébranlable que jamais. À cet admirable instinct du conservation qui lui ralliait, il y a deux ans, le pays tout entier, vient désormais, se joindre le sentiment des services rendus. Les réformes politiques, administratives et financières improvisées en 1848et 1849 commencent, en effet, à porter leurs fruits. Les recettes sont en progression rapide, les rentrées de l’impôt s’effectuent déjà presque aussi aisément, sinon aussi économiquement, qu’en France, et les employés tant en activité qu’en retraite n’osent pas en croire leurs yeux en se voyant payés à jour fixe les correspondance de province insérées dans les journaux de Madrid fournissent des témoignage de ce naïf étonnement. Enfin, le gouvernement vient de présenter aux cortes un projet de loi pour clore le bilan financier du passé et régler la dette publique.




REVUE LITTERAIRE.
LES LIVRES ET LE THEÂTRE.


C’est surtout dans un temps comme le nôtre qu’il est facile de distinguer parmi les esprits brillans et littéraires deux tendances opposées. Les uns, entraînés par une présomptueuse confiance en eux-mêmes ou une ambition irréfléchie à se mêler aux affaires politiques, nous attristent ou nous inquiètent par l’emploi stérile ou funeste de facultés éminentes, détournées de leur but véritable, et mises en contact avec les réalités de la vie publique ; les autres, comprenant la distance qui sépare la rêverie de l’action, l’étude paisible et lointaine de la pratique immédiate et directe, justement effrayés de tout ce que renferment de rebutant pour une imagination délicate les agitations bruyantes