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C’est donc à 764 millions que devrait, toutes choses égales, s’élever aujourd’hui le produit des contributions indirectes pour atteindre aux proportions de 1847 ; mais comment l’espérer, quand on voit que de 1848 à 1849 l’accroissement n’a été que de 16 millions, et quand on songe qu’il faut, pour développer le revenu public, les mêmes conditions qui sont nécessaires au développement du travail, à savoir, la sécurité que nous avons vue fuir depuis février, et la confiance, qui est loin de renaître ? Ajoutons que les nouveaux impôts entrent dans le budget des recettes pour un produit de 60 millions, et que toute source nouvelle que l’on ouvre dans le revenu a pour effet d’abaisser quelque peu le niveau des anciennes.

Point de milieu : ou la sécurité sera complètement rétablie en 1851, et, dans ce cas, le revenu indirect, au lieu de s’arrêter à 720 millions, montera d’un bond à 750 ou 760 ; ou nous continuerons à vivre dans cet état de malaise, d’inquiétude et d’obscurité de l’avenir qui nous mine sourdement, et alors c’est une folie de compter sur un revenu supérieur ou même égal à celui de 1849, année qui avait donné un moment l’essor à quelques espérances.

En abordant les détails, on jugera mieux ce que les assertions du ministre peuvent avoir d’exagéré. Commençons par la taxe des lettres. Les recouvremens ne se sont élevés en 1849 qu’à 36,565,300 francs ; cependant M. le ministre des finances admet un produit de 43 millions 500,000 francs pour l’année 1851. Ce serait un accroissement de 7 millions ou de 19 pour cent. Notez bien qu’en même temps le ministre suppose un accroissement de 8 millions représentant l’élévation de la taxe de 20 centimes par lettre simple à 25 centimes, soit un revenu total de 51 millions et demi. Évidemment, il y aura un mécompte de 5 à 6 millions sur ce chapitre. Le ministre, raisonnant par analogie, rappelle que, la première année qui suivit la réduction de la taxe sur les envois d’argent, le trésor essuya une perte de 30 pour 100, laquelle, par l’accroissement des envois, se trouvait, dès la seconde année, ramenée à 12 pour 100. Cette comparaison pèche par la base. Le droit établi sur les articles d’argent était à peu près prohibitif et ne permettait pas le développement des recettes. La barrière une fois abaissée, le trésor est devenu le banquier des petites bourses ; on a inauguré un service absolument nouveau.

La taxe des lettres, au contraire, dans le système des zones, plus modéré en France qu’ailleurs, avait déjà développé les correspondances. Il circulait, ne l’oublions pas, 95 millions de lettres de bureau à bureau avant la réforme. L’accroissement que la taxe unique devait amener avait été calculé, pour la première année, à 64 millions de lettres ; il n’a été que de 36 millions. Pour que le produit s’élevât, en 1851, à 43 millions et demi, un second accroissement de 35 millions de