Christine, vous ne pensiez pas à moi quand vous avez commis cette coupable action ! coupable action
— Herbert me disait : Venez, vous serez ma femme, je vous aimerai toujours, vous serez libre, heureuse ; tout est prêt pour notre mariage et notre fuite, venez. J’ai répondu : « Je ne veux pas quitter ma mère ! » Ma mère, vous avez été ma sauvegarde ; si c’eût été un crime de suivre Herbert, votre soutenir seul m’a empêchée de l’accomplir. Je n’ai pas voulu quitter ma mère !
Le visage d’Annunciata s’illumina d’un éclair de joie. » Merci, mon Dieu ! » murmura-t-elle ; elle tendit la main à son enfant agenouillée, et, la relevant, elle la fit asseoir ; puis, se plaçant à côté d’elle :
— Parle-moi, Christine, lui dit-elle, ouvre-moi ton cœur, dis-moi toutes tes pensées. Regrettons ensemble tes fautes, tâchons ensemble d’espérer pour l’avenir. Voyons, ma fille, ne me cache rien, parle.
Christine appuya sa tête sur l’épaule de sa mère, elle mit une e ses petites mains dans les siennes, elle soupira profondément, comme si son cœur eût été trop oppressé pour parler ; puis avec fatigue, avec effort, elle dit :
— Mon Dieu ! ma mère, je n’ai rien à avouer que vous ne sachiez déjà. J’aime Herbert. Vous qui avez suivi pas à pas ma vie, vous saviez bien que je devais aimer Herbert. C’est le premier cœur que j’aie trouvé ouvert pour moi. Rappelez-vous donc, ma mère, l’existence que vous m’avez faite ici. Lorsque j’étais enfant, j’ai dit à mes sœurs ; Venez avec moi courir dans la prairie, venez chercher des nids d’oiseaux, allons jouer et chanter ensemble. Mes sœurs m’ont répondu : Allez seule, et elles sont restées assises sur le seuil de la porte à faire tourner le rouet. Je n’ai pas joué long-temps, rien ne me plaisait sur la terre ; j’ai regardé le ciel, je le trouvais bien beau, surtout quand il se couvrait de toutes ses étoiles ; un grand calme semblait descendre d’elles vers moi. Je m’imaginais que le ciel étoilé avait une voix si basse qu’il fallait rester silencieuse et immobile pour l’entendre. Je suis venue vers vous, ma mère, comme autrefois j’avais été chercher mes sœurs ; je vous ai dit : Mère, regardons le ciel ensemble, ces étoiles sont-elles des mondes où l’on est triste, comme nous le sommes ? ou sont-elles des paradis où nos ames iront se reposer ? Et vous m’avez dit : Christine, ne pensez pas à tout cela ; tournez le rouet, comme vos sœurs. Une seule voix sur la terre m’a dit : Moi, j’irai où vous irez, je rêverai comme vous rêvez ; comme vous, je trouve qu’on ne s’aime pas assez sur la terre, et je vous choisis, Christine, pour vous aimer ! Cette voix, ma mère, était celle d’Herbert, Herbert n’était qu’un pauvre étudiant confié à mon père ; mais il a un noble cœur, un peu triste comme le mien. Il est savant, et il est doux pour ceux qui ne savent rien. Il est pauvre, et il a de l’orgueil comme un roi. Il aime, et il ne