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de travail, d’asseoir sur l’accroissement de la richesse territoriale le progrès des revenus de l’état obéré ; voilà de quoi tenter l’ambition d’un ministère d’action. Ce système, si facilement applicable aux propriétés des communes, le serait à plus forte raison à beaucoup de propriétés de l’état. Toutes les mielles placées à portée de puissans moyens de fertilisation ne sont pas, il s’en faut, dans la banlieue de Cherbourg. Les dunes de Dunkerque, de Calais et de Boulogne, les relais des embouchures de la Somme et de l’Authie, les sables étendus au nord et au sud de Granville, les grèves du Mont-Saint-Michel, les lagunes de la Camargue et des côtes de Languedoc, les alluvions de la baie de Fréjus, et tant d’autres qu’on découvrirait en se donnant la peine de regarder, s’offrent pour donner l’impulsion, et il convient que l’état devance ici les communes. Puisse l’autorité des exemples de Napoléon ouvrir au travail cette vaste et féconde carrière ! puisse-t-elle fournir aux populations des campagnes qu’on égare un motif de plus de revenir au vrai, (le bénir et de glorifier cette grande mémoire !

Mais, dira-t-on peut-être avec la vie politique actuelle, où veut-on que des ministres prennent le temps de travailler ? — Si cette vie est inconciliable avec l’expédition des affaires, qui est toujours le premier besoin et dans ce moment la seule voie de salut du pays, il faut la changer. D’abord, le travail direct des ministres, celui dont ils sont maîtres absolus, est-il bien organisé ? On dit qu’ils se réunissent tous les jours en conseil ; c’est se condamner à perdre beaucoup d’heures précieuses. L’empereur Napoléon, qui savait le prix du temps, ne rassemblait les siens qu’une fois par semaine, le mercredi : il pourvoyait à l’unité des travaux par la secrétairerie d’état, institution excellente pour la rapide expédition des affaires, et dont la forme actuelle du gouvernement comporterait le rétablissement modifié. Quant aux rapports avec la législature, trois ministres, ceux de l’intérieur, de la justice, des relations extérieures, suffisent à la direction habituelle des travaux parlementaires ; eux seuls doivent, à tous les instans, appartenir à la politique et à la tribune ; la nature de leurs attributions leur permet de se dispenser des détails sans inconvénient et de ne conserver que la haute direction et la haute surveillance des affaires de leurs départemens. Les autres ministres doivent être uniquement des hommes d’administration et d’autorité : ils n’ont à occuper la tribune que pour la défense d’intérêts avec lesquels ils sont plus familiers que personne, et la meilleure manière de plaire à l’assemblée ou d’y exercer une influence salutaire n’est pas pour eux d’être assidus à ses séances ; c’est d’économiser son temps en consacrant le leur à l’étude des questions qu’ils ont à lui soumettre. Que cette division du travail entre les départemens ministériels devienne une règle, et le temps, qui manque à tout, suffira pour tout, l’aptitude des hommes s’élèvera au niveau des