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l’accomplissement énergique de ses devoirs, l’ascendant durable qui ne s’achète jamais par des complaisances. Il n’en serait pas autrement aujourd’hui. Quelques pertes qu’ait faites le pouvoir exécutif, il lui reste assez de forces pour tout reconstituer : il est armé du choix des hommes, bien supérieur à l’élection, et gouverner, c’est choisir, a dit Louis XIV ; lui seul sait réaliser, quand il est éclairé, l’ordre dans la cité, l’économie dans les finances, les réformes dans l’administration dont on parle dans les assemblées ; lui seul sait maintenir la règle, quand il est ferme. Si, par un inexplicable travers, des assemblées ou plutôt des fractions d’assemblée s’obstinaient à l’entraver dans la carrière du bien, leur cause serait promptement perdue devant la nation.

On voit, il est vrai, de temps en temps, des divisions aussi inexplicables dans leurs causes que funestes dans leurs effets se former dans le sein de la législature : elles sont le plus grand embarras de notre situation ; mais à peine sont-elles accomplies, que leurs fauteurs, avertis par le danger, appellent la fusion des partis, la conciliation des intérêts, et proclament que le salut de la société est à ce prix. L’union ne sortira pourtant ni des concessions faites par la sagesse des hommes, ni du sentiment des périls de la situation : elle était aussi nécessaire sous la première assemblée législative que sous celle-ci, et l’on sait quelle fut la durée de la réconciliation qui fut scellée par le baiser Lamourette ; mais l’union s’opérerait infailliblement à la suite d’un pouvoir énergique, se contentât-il de faire avec résolution et persévéra ace de bonnes choses à défaut de grandes. Aucun parti ne refuserait impunément son concours à une administration plus forte de ses actes que de ses paroles ; si sa résistance ne fléchissait pas sous la toute-puissance de l’opinion publique, son isolement deviendrait une abdication. Le secret de la puissance dans notre siècle et notre pays, c’est donc le bon emploi du temps, c’est le travail, le travail auquel Napoléon prétendait devoir sa fortune et celle de la France.

Personne n’a vécu dans nos assemblées sans apercevoir qu’elles ne sont guère prisées du public et d’elles-mêmes qu’en raison du spectacle qu’elles donnent. Sous le régime du privilège électoral, ce spectacle était une grande affaire ; il a beaucoup perdu de son prestige et de son importance par l’établissement du suffrage universel. Les masses, qui n’ont point de place dans la salle des séances, ne sauraient être séduites, comme les assistans, par le talent des acteurs et l’éclat de la représentation. C’est par l’administration, plus nécessairement chargée parmi nous qu’en aucun autre pays de pourvoir aux besoins collectifs de la société, qu’elles sont en contact avec le gouvernement, et c’est bien moins sur le bruit que fait un député que sur l’action qu’exerce un préfet, qu’elles jugent l’autorité souveraine, s’y affectionnent ou s’en détachent : elles estiment avant tout la droiture et la vigueur, et,