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<poeem>…Ibi auram, Insperatam auram divino efflantis ab ore, Ore trahens, subito correptus numinis haustu, Afflatusque Deo…</poem>

Ainsi, dès sa naissance, le Christ est déjà Dieu ; il l’est même aussi dans le sein de sa mère. Ne nous étonnons pas maintenant que les légendaires, dont l’imagination va plus loin que celle des poètes, aient fait parler Jésus dans le sein même de sa mère. Ne nous étonnons pas non plus de lire dans l’Alcoran[1] que, Joseph voyant la grossesse de Marie et ayant conçu des doutes, l’enfant Jésus, élevant-la voix du sein de sa mère, dit : « O Joseph ! que veulent dire ces soupçons ? Lève-toi, va à tes affaires, et demande pardon de ton péché. » Chose curieuse, ce n’est pas seulement dans les apocryphes que Mahomet a pris cette tradition de Jésus parlant du sein de sa mère. Les apocryphes l’avaient eux-mêmes peut-être empruntée aux fables répandues sur la naissance d’Apollon et de Diane. Callimaque, dans son hymne sur Délos, raconte que, Latone chassée de Thèbes et songeant à chercher un asile dans l’île de Cos, Apollon prit la parole dans le sein de sa mère pour lui conseiller d’aller chercher asile à Délos.

Sannazar finit son poème par une prédiction des miracles du Christ, prédiction mise dans la bouche de Protée. C’est toujours le même système de confusion et d’alliances qui caractérise l’époque de la renaissance ; mais, malgré cet anachronisme, je ne veux point oublier les derniers vers de son poème, vers charmans, pleins du charme du climat de Naples, pleins de la beauté de cette mer d’azur qui vient en caresser les bords : « C’est ici que je termine mes chants sur l’enfantement divin que j’ai osé célébrer. Et maintenant les frais ombrages du Pausilippe, les rivages de la mer, Neptune, ses tritons, le vieux Nérée et ses nymphes m’invitent au repos ; vous surtout, bords charmans de Mergellina, avec vos grottes chères aux Muses, avec vos orangers chargés de fleurs odorantes, l’oranger qui donne à nos climats la beauté des bois de l’Orient et ceint mon front d’une couronne plus belle que le laurier[2]. »

Je serai plus court sur Vida

  1. On sait que l’Alcoran a beaucoup puisé dans les faux évangiles répandus-en Orient.
  2.  Hactenus, ô superi, partus tentasse verendos
    Sit satis ; optatam poscit me dulcis ad umbram
    Pausilypus, poscunt Neptunia littora, et udi
    Tritons, nereusque senex, Panopeque, Ephyreque,
    Et Melite, quœque in primis mihi grata ministrat
    Otia, Musarumque cavas per saxa latebras,
    Mergellina, novos fundunt ubi citria flores,
    Citria Medorum sacros referentia lucos,
    Et mihi non solita nectunt de fronde coronam.