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trois ou quatre marches, on voit un globe rouge et au-dessous un croissant blanc : le soleil et la lune. Les Pébouns sont d’excellens ouvriers et même d’habiles artistes ; ils réussissent dans tous leurs travaux ; beaucoup d’entre eux possèdent des connaissances assez étendues en physique et en chimie. Le drap nommé pou-lou n’est teint par personne aussi bien que par eux. Les Pébouns professent le bouddhisme indien. Une robe de pou-lou violet, un bonnet en feutre de couleur foncée et une écharpe rouge qui, après avoir fait deux fois le tour du cou, tombe sur les épaules, composent leur costume. Tous les matins, ils s’ornent le milieu du front d’une tache rouge ponceau.

Les Katchis sont des musulmans ordinaires de Kachemir ; ils font le commerce des objets de luxe et de toilette ; ils remplissent en outre le rôle d’agens de change ; leurs magasins sont riches et bien tenus ; par un privilège tout spécial que le Talé-lama leur a garanti, ils ont un gouvernement particulier. Leur chef ou gouverneur exerce tout à la fois le pouvoir administratif et le pouvoir religieux. Non contens d’observer rigoureusement la loi de Mahomet, les Katchis affichent encore un profond mépris pour le bouddhisme ; ils n’en sont pas plus mal vus du gouvernement lamanesque, dont la tolérance est vraiment sans limite.

Parmi les Chinois, les uns appartiennent à la garde permanente du kin-tchaï, ou délégué du céleste empereur ; d’autres exercent quelque emploi dans les tribunaux ; d’autres encore se livrent à divers trafics plus ou moins suspects ; ils sont tous également détestés et méprisés.

Si les Thibétains ne peuvent rivaliser, ni avec les Pébouns pour les travaux métallurgiques, ni avec les Katchis pour la confection des objets de toilette, on ne leur connaît pas en revanche de rivaux pour la fabrication du pou-lou, des tsan-hiang et de la poterie ; ils travaillent aussi le bois avec habileté. Le pou-lou est une étoffe de laine ; en en fait pour tous les goûts et toutes les bourses ; à côté du drap à longs poils et à vil prix se trouve du mérinos d’une finesse extrême et d’une cherté excessive. H’Lassa fait de très grandes exportations de pou-lou pour la Chine et la Tartarie. Les tsan-hiang sont des bâtons d’odeur ; on les fabrique avec la poudre de divers arbres aromatiques, mêlée de musc et de poussière d’or ; ces bâtons sont de couleur violette et longs de trois à quatre pieds ; une fois allumés, ils se consument lentement sans jamais s’éteindre et répandent au loin une odeur exquise. Les Chinois, qui imitent tout, qui sont les plus habiles contrefacteurs du monde, ne peuvent réussir à contrefaire les tsan-hiang d’une façon supportable.

Au Thibet comme en Mongolie, chacun possède une écuelle de bois dont il ne se sépare jamais ; les élégans l’enferment dans une bourse qu’ils suspendent à leur ceinture, les gens sans façon la serrent sim-