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gagné tant de notabilités bourgeoises et où une multitude de personnes, à défaut de parchemins, sophistiquaient leurs noms de manière à y donner une apparence nobiliaire, deux hommes d’état, les plus éloquens de nos assemblées ; pour ne pas dire de l’Europe entière et dont la supériorité était si bien reconnue, qu’ils furent presque toujours ministres, tour à tour ou ensemble (et pourquoi ne fut-ce pas constamment de cette dernière façon !), furent inébranlables dans leur résistance à l’entraînement de l’universelle vanité. Ils se firent un point d’honneur de demeurer roturiers. M. Thiers était l’un des deux. Or, quand on a ainsi à cœur de ne pas se séparer de la masse du peuple, peut-on être accusé d’en être l’ennemi ?

Mais trêve de préliminaires. Analysons le rapport. Avant tout, il n’est pas inutile de donner quelques renseignemens sur la teneur de cette pièce et sur la part qui y est faite à chacun des sujets spéciaux. Sur 156 pages, 21 sont consacrées aux principes généraux, à l’exposé des caractères et des conditions de la bienfaisance publique et privée, 9 aux établissemens qui concernent l’enfance et l’adolescence, les crèches, les salles d’asile, les sociétés de patronage, les hospices de sourds-muets et d’aveugles et autres institutions analogues ; 38 à ce qui concerne l’âge mûr, en trois chapitres qui ont pour objet : le droit au travail, les institutions de crédit, y compris le crédit foncier, et les associations d’ouvriers. Les moyens de parer aux chômages accidentels occupent 16 pages. Vient ensuite la colonisation, qui en absorbe 12, dont une partie pour les défrichemens de l’intérieur, ou colonies agricoles d’adultes. L’abolition de la mendicité par le moyen des dépôts prend 2 pages ; l’amélioration des logemens, 3 ; les sociétés de secours mutuels en ont 9. Les institutions qui sont destinées à soulager la vieillesse, mais dont les ressources sont amassées par l’âge mûr, les caisses d’épargne et la caisse des retraites ; remplissent 30 pages. Quelques aperçus sur les hospices en forment 3, et une dizaine de pages consacrées à résumer tout ce qui précède couronnent le document.

Essayons maintenant de qualifier les diverses parties du rapport.

Au sujet de l’enfance, des projets de loi sont annoncés : l’un sur les tours pour les enfans abandonnés, un autre sur le travail des enfans dans les manufactures, un troisième sur l’apprentissage, le dernier sur les jeunes détenus, qu’on enverrait tous dans des colonies agricoles pénitentiaires du genre de celle de Mettray. La sous-commission qui a formulé ces projets de loi examinera s’il ne serait pas possible de multiplier les maisons de sourds-muets et de jeunes aveugles, qui sont admirablement tenues chez nous, mais dont le nombre est bien disproportionné aux besoins. On recherchera aussi les moyens à employer pour propager les crèches et les salles d’asile, pour mieux régler les bureaux de nourrices, pour mieux garantir contre la cupidité des