financière, la construction et l’exploitation. On confierait aux ingénieurs la construction, à des entrepreneurs spéciaux l’exploitation, aux hommes de finance la commandite. La construction et l’exploitation serait concédées à forfait. L’état traiterait directement avec les constructeurs et les entrepreneurs, ou bien il traiterait indirectement avec eux par l’intermédiaire des capitalistes. Dans ce système, il n’y a plus rien d’inconnu, rien d’imprévu. La spécialité et l’expérience doivent amener l’exactitude rigoureuse des calculs. Chacun fait son métier, et s’en acquitte sous sa responsabilité. L’état sait à quoi il s’engage ; il sait aussi sur quoi compter ; Le constructeur, l’entrepreneur, fournissent un cautionnement ; s’ils échouent, l’état est garanti. Telle est la combinaison dont nous avons déjà parlé, et qu’il serait inutile d’indiquer ici plus longuement : système erroné ou chimérique sur quelques points, mais qui nous paraît aussi renfermer des idées justes dont on pourrait profiter. Nous voyons, par le rapport de M. Vitet, que ce nouveau plan a eu peu de succès devant la commission. Il lui reste à se produire plus heureusement à la tribune.
La discussion qui va s’ouvrir à l’assemblée sur le chemin de Paris à Avignon a une importance qu’on s’efforcerait en vain de dissimuler pour se soustraire aux devoirs qu’elle impose. Jusqu’ici, depuis la révolution de février, tous les efforts du parti de l’ordre, en ce qui touche les questions de finances, ont dû tendre nécessairement à empêcher le mal, à lutter contre les faux principes, a défendre les impôts, à protéger l’administration et le budget Du reste, rien de grand, rien de considérable n’a été tenté On a vécu humblement, au jour le jour. On s’est tenu sur la défensive ; on a fait, en matière de finances, de la politique de résistance. Nous entrons aujourd’hui dans la politique d’action. Demander aux capitaux 260 millions pour accomplir une grande œuvre industrielle, pour ranimer le crédit, pour combattre le socialisme par le travail, ce n’est plus là seulement résister : c’est agir. Espérons que, pour agir utilement, on comprendra la nécessité d’agir de concert dans la discussion, et qu’on se fera au scrutin des concessions réciproques. Autrement, tout serait perdu. Il ne faudrait pas renouveler aujourd’hui le spectacle des rivalités industrielles que nous avons vues sous la monarchie. Des rivalités industrielles à propos du chemin de Paris à Avignon auraient le double danger de suspendre indéfiniment l’exécution du chemin et de créer des inimitiés politiques. Ce serait le plus agréable passe-temps qu’on pût offrir aux ennemis de la société.
La session du parlement s’est ouverte le 31 janvier et, pour la première fois depuis l’existence du cabinet whig, l’adresse en réponse au discours de la reine a donné lieu à un débat. Le ministère s’y attendait ; il avait introduit dans le discours de la reine une phrase provocatrice qui était une sorte de défi jeté aux avocats de la protection, et, dans la prévision de la lutte qui devait s’engager, il avait adressé à tous ses partisans l’invitation la plus pressante d’assister à l’ouverture du parlement. Jamais la chambre des lords n’avait été si nombreuse, et les journaux ont signalé ironiquement la présence d’un certain nombre de législateurs habitués à voter par procuration et qui cette fois ont payé de leur personne Aussi le ministère, qui, l’année dernière, n’avait dû l’avantage en plusieurs circonstances qu’aux votes par procuration, dont le duc de Wellington disposait en sa faveur, a-t-il eu, cette année, dans la chambre des lords une majorité réelle et sérieuse de 29 voix.
La majorité ministérielle a naturellement été beaucoup plus considérable