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la plus vaste, et des choses les plus basses jusqu’aux plus élevées la parcourent tout entière avec la même égalité.

Dès son arrivée à Paris, Poussin se mit au travail, faisant tout ce qu’on lui demandait : des frontispices pour une bible et pour un Virgile, qui sont des chefs-d’œuvre ; des cartons pour la galerie du Louvre, des projets pour ses deux tableaux de la Cène et du Saint Xavier, et pour le Baptême de Jésus-Christ, qu’il avait promis au chevalier del Pozzo. On le laissa commencer assez tranquillement. Le roi l’avait reçu de la manière la plus flatteuse ; il l’avait entretenu long-temps, et avait dit en se tournant vers les courtisans : « Voilà Vouet bien attrapé. » Il n’y avait pas moyen de lutter contre une pareille faveur. Le brevet du 2 mars 1641, dont Félibien nous a conservé le texte[1], qui nomme Poussin premier peintre du roi, dit en propres termes : « Sa majesté l’a choisi et retenu pour être son premier peintre ordinaire, et en cette qualité lui a donné la direction générale de tous les ouvrages de peinture et d’ornement qu’elle fera ci-après pour l’embellissement de ses maisons royales, voulant que ses autres peintres ne puissent faire aucuns ouvrages pour sa majesté sans en avoir fait voir les dessins et reçu sur iceux les avis et conseils dudit sieur Poussin. »

Poussin employa la plus grande partie de cette année 1641 à préparer les dessins nécessaires à la décoration de la grande galerie du Louvre. « La grande galerie s’avance fort, écrit-il à M. de Chantelou, et néanmoins il y a fort peu d’ouvriers… Je me suis occupé sans cesse à travailler aux cartons, lesquels je me suis obligé de vernir sur chaque fenêtre et sur chaque trumeau, m’étant résolu d’y représenter une suite de la vie d’Hercule, matière certes capable d’occuper un bon dessinateur tout entier[2]. » Malheureusement, Poussin savait peu de combien de précautions il faut envelopper les meilleures intentions. Fort de la commission positive qu’il avait reçue du roi d’ordonner les travaux de la galerie, et en homme qui se sent capable de la remplir, il attaqua de front son projet, sans trop ménager, à ce qu’il semble, les susceptibilités et les intérêts d’autrui. Il fit abattre les constructions massives et sans goût que Le Mercier, architecte du roi, avait élevées, et se fit de cet homme puissant un ennemi de plus, qui alla se joindre à la phalange de ses envieux. Fouquières, peintre flamand qui avait été chargé de peindre

  1. Félibien, IV, 28. Le texte de ce brevet ne laisse pas que d’être fort embarrassant. Le titre de premier peintre du roi y est donné à Poussin de la manière la plus positive. Ce brevet est du 2 mars 1641. Or Vouet (d’après les biographes) n’est mort qu’en juin de la même année. Si cette date de la mort était exacte, la contradiction s’expliquerait encore, car, déjà malade, il aurait pu donner sa démission ou être remplacé ; mais l’explication devient plus difficile, si, comme le dit Félibien, il se maria en 1640 et eut trois enfans de ce mariage.
  2. Correspondance, p. 55.