près de même à Winchester, à Durham et ailleurs ; mais combien ces alentours des cathédrales anglaises, tout aimables qu’ils sont, restent loin pour moi de la cour qui précède la cathédrale de Cordoue, comme toutes les autres mosquées, avec ses orangers et son palmier près de la fontaine !
Pour Grenade, c’est le lieu incomparable. Beauté, des arbres, fraîcheur des eaux, tout ce qui manque si souvent à l’Espagne ; vue admirable sur cette mer de verdure qu’on appelle la Vega, et sur les ravins pittoresques au fond desquels coulent d’un côté le Darro, de l’autre le Xenil, si fameux dans les ballades moresques ; champs de cactus, végétation africaine tapissant le flanc des montagnes que couronnent les blancs sommets de la Sierra-Nevada, les plus beaux sites de l’Angleterre et de l’Écosse ne sauraient offrir cette opposition merveilleuse de la puissance et de la grace réunies ; elles n’offrent rien non plus qu’on puisse comparer à l’Alhambra.
Je ne décrirai pas l’Alhambra La parole n’a rien à faire avec les mille caprices de l’art moresque ; ces ornemens infiniment variés dont la fantaisie la plus libre et la plus gracieuse a semé les murs et les voûtes de l’Alhambra, et que l’immortel auteur du Dernier des Abencerrages a si poétiquement comparés à ces étoffes de l’Orient que brode dans l’ennui du harem le caprice d’une femme esclave. Cependant je ne puis nommer l’Alhambra sans donner un souvenir à cette merveilleuse soirée à la fin de laquelle je vis la lune descendre dans la cour des Abencerrages, frapper tour à tour comme d’une tache mobile de lumière les portiques élégans, les sveltes colonnes, les lions bizarres de la fontaine, pénétrer dans la salle des Ambassadeurs ; que la nuit remplissait, et faire jaillir de cette nuit comme un feuillage lumineux les ornemens les plus délicats, les plus finement fouillés de ce monument sans pareil. Quelles heures dans une vie que les heures passées, à épier la lune se glissant dans le petit jardin de l’infante Lindaraxal à regarder d’en haut les grands arbres qui montaient vers nous du sein de la nuit, et venaient blanchir leur tête dans la clarté de la lune répandue à nos pieds, tandis qu’au-dessous Grenade étalait ses lumières dispersées et que brillait en même temps un feu allumé dans la montagne pour éclairer une danse de bohémiens, et la petite lumière qui précédait un prêtre allant porter, à travers la foule agenouillée, le viatique à un mourant !
Oserai je dire quel monument, en Angleterre, a éveillé en moi un souvenir de l’Alhambra ? C’est le château de Windsor. Il est bien entendu que les différences sont énormes ; mais Windsor est composé, comme l’était l’Alhambra, d’un certain nombre de tours liées par des murs entre elles et avec un palais fortifié, placé au sommet d’un escarpement. En se promenant sur la terrasse de Windsor, on voit monter