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ces 250 millions, il faut les demander à une courageuse économie. M. Cobden veut donc qu’on supprime les dépenses de l’armée et de la marine. Ce plan n’est pas sérieux. Un grand pays a toujours besoin de conserver les moyens de défendre et de faire respecter son indépendance. Que deviendrait le commerce de l’Angleterre, si elle cessait de pouvoir le protéger sur toutes les mers, faute de vaisseaux ? M. Cobden prétend que les dépenses que nécessitent chaque année l’armée et la flotte sont une perte sèche pour l’Angleterre. Nous serions curieux de savoir si, lorsque M. Cobden était encore fabricant, il inscrivait aux frais généraux ou aux pertes sèches la prime annuelle qu’il payait pour son établissement aux compagnies d’assurance.

Ceux qui repoussent à la fois les plans des protectionistes et le plan de M. Cobden se contentent de dire que l’agriculteur anglais ne doit s’en prendre qu’à son ignorance et à son apathie, s’il est vaincu par les étrangers sur son propre marché. Qu’il amende ses terres et qu’il améliore ses procédés de culture ; il verra ses récoltes devenir plus productives, et il pourra vendre meilleur marché que les étrangers. « Demandez, disait sir George Grey, demandez aux fabricans si, dans leurs ateliers, ils ont encore un morceau de fer, une brique, provenant de leurs appareils d’autrefois. Depuis trente ans, machines, procédés de fabrication, résultats, tout a changé, et tout continue encore à changer. » Le véritable remède aux yeux de ceux-ci est donc ce qu’on appelle en Angleterre le high farming system, ou l’emploi des grands procédés. Il consiste à multiplier la main-d’œuvre pour ne jamais laisser la terre en repos, et à combiner l’emploi des amendemens avec l’amélioration du sous-sol par les assénemens ou l’irrigation, suivant le terrain. Sir Robert Peel est du nombre de ceux qui croient que le remède aux maux de l’agriculture est dans les progrès qu’elle peut faire. Dans une lettre publiée il y a quelques semaines, et qui a fait une grande sensation en Angleterre, il annonce à ses fermiers que, s’ils paient la totalité du terme échu, il consacrera 20 pour 100 du fermage à des travaux sur leurs fermes, et qu’à la même condition il en fera autant l’été prochain. Il offre de se charger des travaux d’assèchement, si le fermier veut porter les matériaux sur les lieux et payer 4 pour 100 de la dépense, et il se déclare prêt à concourir à l’exécution de toute amélioration permanente. Il prétend qu’en certains endroits il est possible d’augmenter considérablement la production avec quelques dépenses et des efforts bien dirigés. Un pareil plan, qui peut convenir à de riches particuliers, est inexécutable ; il ne peut jamais devenir d’une application générale, parce qu’il exige des capitaux que les fermiers anglais n’ont pas à leur disposition, et que les propriétaires eux-mêmes ne peuvent pas fournir, à moins d’avoir d’autres revenus que celui qu’ils tirent de leurs terres. « Sir