whig nous semble facile à expliquer ; elle nous paraît la conséquence forcée des graves changemens introduits par sir Robert Peel dans la législation économique de l’Angleterre. Sir Robert Peel a pris pour lui le côté brillant et populaire de cette révolution ; il a laissé à ses successeurs la tâche ingrate de la compléter et de la terminer.
Nous sommes de ceux qui n’ont point épargné les éloges à sir Robert Peel. Nous l’avons suivi avec une sympathique émotion dans tout le cours de cette session mémorable qui mit fin à son pouvoir, alors que lord George Bentinck le poursuivait de ses philippiques, quelquefois brutales et souvent éloquentes, et que M. Disraëli l’accablait de ses sarcasmes les plus acérés et les plus amers ; alors que, déterminé à tomber, il voyait ses anciens adversaires, les whigs, le soutenir avec enthousiasme et le combattre à regret ; alors que M. Cobden, prêt à voter contre lui, l’adjurait de garder le pouvoir en renonçant à son bill sur l’Irlande. Cette session ne fut qu’un long drame, où tout l’intérêt s’était concentré sur sir Robert Peel ; ces luttes ardentes autour d’un homme inflexible qui tenait entre ses mains les destinées de l’Angleterre rappelaient la fable antique de Prométhée ; il semblait que la liberté commerciale remplaçât le feu sacré, et dût coûter, comme lui, la vie à celui qui l’apportait. On ne pouvait pourtant se dissimuler que l’avenir de l’Angleterre était engagé dans cette lutte où il ne s’agissait en apparence que d’un homme, et en admirant la force de volonté avec laquelle sir Robert Peel imposait au parlement l’abolition des lois sur les céréales, on se demandait si la situation de la Grande-Bretagne exigeait absolument ce remède héroïque.
Il est temps aujourd’hui de juger l’œuvre de sir Robert Peel, de chercher si elle a produit tous les résultats que ce hardi novateur en attendait, et de voir si, à côté de la plaie qu’elle guérissait, elle ne créait pas une plaie nouvelle. Peut-être cet examen prouvera-t-il que la célèbre doctrine du libre échange, au lieu de reposer, comme on le croit à Manchester, sur des principes éternels, applicables à tous les temps et à tous les pays, n’est qu’une théorie de circonstance, produite et justifiée par la situation exceptionnelle de l’Angleterre ; peut-être prouvera-t-il surtout qu’une impérieuse nécessité ne laissait à nos voisins que le choix entre deux maux, et qu’elle a entraîné sir Robert Peel à sacrifier aux exigences du présent l’avenir de l’Angleterre. C’est une question de fait qui est ici soulevée ; le soin de débattre la question théorique appartient aux économistes de profession.
Dans les derniers jours de la session de 1849, M. Disraëli fit au sein de la chambre des communes la demande d’une enquête sur l’état de