Page:Revue des Deux Mondes - 1850 - tome 5.djvu/386

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est parce que nous sommes bien convaincu de cette vérité, que nous avons recherché si, aux hasards d’une expédition coûteuse et comparativement lente à accomplir, compromettante dans ses conséquences, il ne conviendrait pas de substituer un autre système de répression plus sûr, plus rapide et plus économique. Ce système n’offre pas, on l’avoue, au même degré du moins, les chances et l’attrait d’un brillant coup de main bien conçu, hardiment exécuté ; mais il s’agit ici d’un système et non pas d’un fait de guerre isolé, d’un accident : il s’agit surtout d’un but sérieux à poursuivre, et nous croyons qu’il faut savoir ici sacrifier le côté brillant à des considérations sérieuses.

Que si l’on pouvait espérer, en frappant un grand coup, de fonder une fois pour toutes une paix durable, de conquérir par un grand effort les avantages et la sécurité d’un bon voisinage, nous admettrions volontiers, le cas échéant, l’opportunité d’une expédition en règle, avec ses charges et ses hasards ; mais tel ne serait pas le résultat des sacrifices que l’on s’imposerait. Il faut bien s’y attendre : nous aurons long-temps à lutter contre nos fanatiques voisins ; la paix ne sera qu’une trêve. En 1844, la France a dirigé une expédition contre le Maroc ; elle était à la veille d’en faire partir une autre en 1849. La trêve a donc été de cinq ans, et pourtant la leçon avait été rude, le canon d’Isly avait répondu victorieusement au canon de Tanger et de Mogador. D’ailleurs, la situation politique de la France a été profondément modifiée au dedans et au dehors il est donc permis de croire à des trêves moins longues aujourd’hui.

Nous avons essayé de rendre sensibles par un exemple les inconvéniens du système d’occupation ; nous avons voulu démontrer que ce système de guerre, pratiqué en 1844, alors qu’il était permis d’en attendre une paix durable, pouvait, en y persistant, embarrasser la politique du pays et le jeter, contre son gré, dans les hasards d’une guerre de conquête. Quelles que soient les destinées que la Providence réserve à notre pays sur la terre d’Afrique, quelle que puisse y être un jour sa part d’action et d’agrandissement, il a aujourd’hui une autre tâche à remplir : c’est, avant tout, d’y consolider et d’y affermir l’œuvre commencée depuis bientôt vingt ans. Or, pour consolider et affermir, il faut nous tenir toujours prêts à réprimer.


BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.


LITTERATURE ANGLAISE, — Redburn, — his first Voyage (Redburn, son premier Voyage), par Hermann Melville.[1]

M. Hermann Melville, l’auteur de Typee, d’Omoo et de Mardi[2], vient de paraître de nouveau devant le public. Son livre n’est pas un de ces récits

  1. Deux volumes. Richard Bentley, Londres, 1849.
  2. Voyez, sur les précédens ouvrages de M. Hermann Melville, la Revue du 15 mai 1849.