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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 janvier 1850.

Avant de parler des affaires intérieures, de l’assemblée, du ministère ou du président, il nous sera permis de dire un mot du rapport de M. le général Herbillon sur le siége de Zaatcha, dans le Sahara. Personne, à l’heure qu’il est, n’y pense peut-être plus à Paris ; mais, ayant à parler dans cette quinzaine de beaucoup de choses qui nous plaisent médiocrement, nous voulons d’abord nous entretenir de choses qui nous consolent, qui nous raniment, qui nous font bien espérer du pays. Oui, un pays où il y a tant de braves soldats et tant de braves officiers prêts à mourir héroïquement pour l’honneur du drapeau, ce pays-là n’a pas épuisé sa vitalité. Il ne faut désespérer que des pays où l’on ne sait plus bien mourir, et c’est là ce qui fait que l’armée française a toujours été pour la France un sujet de consolations et d’espérances. À voir comment le courage et la discipline s’y conservaient, à voir comment l’esprit de commandement et de hiérarchie s’y entretenait, quand il s’éteignait partout ailleurs, chacun sentait que la France devait vivre, quelque éclipse qu’elle se permît de son bon sens et de sa fermeté ordinaires. L’armée a toujours été le cœur de la France, et tant que le cœur n’est pas glacé, on ne meurt pas.

Et ce ne sont pas ici de vains mots : l’armée est bien vraiment le cœur de la France ; elle est nationale, s’il en fut jamais ; elle sort de la nation et elle y rentre. L’École de Saint-Cyr et l’École polytechnique la recrutent par l’instruction, mais la recrutent dans tous les rangs de la nation. Elle ne semble parfois se séparer de la masse du pays que pour valoir mieux, pour avoir plus de constance et de suite, plus d’ordre et de régularité. Elle a le courage du peuple ; elle a l’organisation d’un gouvernement.