quatre années le pavillon anglais dans l’Océan Pacifique. La France donne aussi, bien que plus rarement, à ses vaisseaux des missions pareilles ; puis elle s’en tient à ces démonstrations stériles, et c’est là précisément ce que ne fait pas l’Angleterre. À côté de ces longues croisières, dont on a pu prendre une idée par le journal de M. Walpole, de petites campagnes se continuent et se succèdent sans cesse. Derrière la frégate marche une corvette, qui ne remplit, elle, qu’une mission d’utilité, et recueille les fruits de la mission politique de sa devancière. Chaque année, par exemple, une corvette de guerre anglaise fait le tour de ces côtes qu’a visitées le Collingwood, et elle rapporte du Mexique et du Pérou une riche cargaison d’or et d’argent, tant en monnaie qu’en lingots, — en lingots surtout. Dans ces mêmes parages, la tâche de la marine française est bien différente.
Avant la révolution de février, les ministres de France au Mexique ont plus d’une fois sollicité de notre gouvernement l’envoi annuel d’un bâtiment de guerre sur les côtes de l’Océan Pacifique. Ces sollicitations sont restées vaines. Aujourd’hui veut-on s’obstiner encore à ne rien faire ? Il y aurait pourtant dans cette mesure une source d’avantages pour la marine aussi bien que pour le commerce de la France. Il ne faudrait pour cela que renoncer à certaines allures chevaleresques dont ne s’accommode plus notre époque de positivisme. Les navires de guerre français, par une générosité mal entendue, ne doivent percevoir aucun droit sur le transport de l’or et de l’argent pour le commerce des nationaux, et des ordres formels les empêchent de s’en charger pour le compte des commerçans étrangers. Qu’en résulte-t-il ? C’est que les officiers qui commandent ces navires, moralement responsables de valeurs dont ni l’état ni eux ne doivent retirer le moindre avantage, sont peu soucieux de les prendre à leur bord ; puis, de longues croisières restent à terminer, et l’incertitude de la date des retours décourage les commerçans français : ceux-ci préfèrent alors confier ces valeurs aux navires marchands, quoique les risques à courir y soient plus grands et par conséquent les primes d’assurance plus fortes. La marine militaire anglaise est affranchie de cette gêne, et par conséquent recueille des bénéfices là où nos officiers ne rencontrent qu’une responsabilité, un embarras de plus. L’Angleterre est commerçante avant tout. Voulant assurer à son commerce la protection active et régulière de son pavillon dans les mers les plus lointaines, elle s’est arrangée à merveille pour que cette protection ne lui devînt pas trop coûteuse. Elle a organisé commercialement sa marine militaire. Comme les navires du commerce, les vaisseaux de guerre anglais prennent à prix fixe les retours pour l’Europe. Le négociant, à quelque nation qu’il appartienne, profite d’une occasion qui lui offre à la fois la sécurité et la rapidité