événemens qui se sont accomplis depuis quelque temps, et tâchons d’entrevoir le dénoûment de ce drame bizarre et compliqué.
Disons tout d’abord que ce qui rend le dénoûment si difficile à entrevoir, c’est qu’il y en a deux. C’est ici un véritable drame romantique, et qui peut finir à volonté par une comédie ou par une tragédie. La Prusse peut s’entendre avec l’Autriche, partager avec elle le pouvoir en Allemagne, et remettre à un lendemain indéfini les institutions libérales qui devaient résulter, dit-on, de l’unité de l’Allemagne, ou même laisser les divers états de l’Allemagne accomplir dans leur sein les changemens que l’opinion publique peut réclamer. Les choses, en effet, en Allemagne, sont dans ce bizarre état que tout ce que l’Allemagne cherche par l’unité, elle peut l’avoir aussi bien par la diversité, que les constitutions particulières des états peuvent arriver au même résultat que la constitution générale de l’Allemagne unie, et qu’on se demande enfin parfois pourquoi l’Allemagne veut avoir en gros, en traversant je ne sais combien d’impossibilités, tout ce qu’elle peut avoir en détail, sans rencontrer d’autres difficultés que des difficultés ordinaires. L’accord de l’Autriche et de la Prusse et l’ajournement des utopies de Francfort, voilà le premier dénoûment que nous entrevoyons au drame de l’unité germanique, et c’est pour ce dénoûment que nous avons toujours parié, comme étant le plus simple et le moins exposé aux péripéties révolutionnaires.
L’autre dénoûment, qui serait le dénoûment tragique, serait que la Prusse s’obstinât à avoir le parlement germanique d’Erfurth ; que l’Autriche, de son côté, s’obstinât à résister aux vœux de la Prusse, et que la guerre sortit de ce dissentiment. Nous espérons que ce dénoûment sera évité.
En attendant, un des principaux personnages du drame de 1848, l’archiduc Jean, vient de se retirer définitivement de la scène, On sait comment l’archiduc Jean avait été nommé lieutenant-général de l’empire par le parlement germanique : il représentait l’unité de l’Allemagne dans le pouvoir exécutif comme le parlement la représentait dans le pouvoir législatif. Le parlement germanique s’est évanoui ou déchiré dans les convulsions de la démagogie ; mais l’archiduc Jean restait encore debout comme la dernière personnification ou la dernière ombre de l’unité de l’Allemagne. Cela lui faisait encore une sorte d’autorité morale dont il ne pouvait plus rien faire pour lui-même et pour l’Allemagne, mais dont il pouvait faire un legs utile et profitable pour qui le recueillerait. De là l’empressement que la Prusse avait eu de faire abdiquer à son profit l’archiduc Jean ; mais l’archiduc Jean, se souvenant de Marie-Thérèse, a refusé d’abdiquer entre les mains de la Prusse : il n’a pas voulu non plus attendre la réunion conjecturale du parlement allemand d’Erfurth pour déposer entre les mains d’une assemblée germanique le pouvoir qu’il avait reçu des mains d’une assemblée germanique ; il a abdiqué entre les mains de la commission intérimaire, composée de deux députés de l’Autriche et de deux députés prussiens et chargée d’exercer le pouvoir. Cette abdication de l’archiduc Jean au profit de la commission intérimaire plutôt qu’entre les mains du parlement à naître d’Erfurth montre vers quel dénoûment le drame semble marcher.
Ce qui ressemble le plus, en effet, à la diète germanique de 1815 et ce qui ressemble le moins au parlement germanique de Francfort, c’est la commission austro-prussienne, chargée par intérim du pouvoir fédéral. C’est un pou-