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sures de répression qu’ont adoptées les préfets ont été approuvées et encouragées par le ministre de l’intérieur. Ce soin de l’administration suffit-il à la tâche d’un gouvernement ? Nous serions tentés de répondre oui dans le moment présent. Gouverner, selon quelques personnes, c’est imprimer au pays une direction ; c’est lui faire une destinée. Or, on nous a fait ou voulu faire tant de destinées diverses depuis deux ans, on nous a imprimé ou voulu imprimer tant de directions contraires, que nous ne serions pas fâchés qu’on laissât le pays se reposer un peu de tant d’essais de gouvernemens, et que l’on se contentât de l’administrer avec sagesse et avec fermeté. Il se ferait alors son sort à lui tout seul, comme se le font en général et comme doivent se le faire les sociétés modernes. Le gouvernement dans nos grands états modernes est la plus petite partie de l’activité de la société. La plus grande et la plus décisive portion de cette activité est en dehors du gouvernement ; elle est dans l’industrie, dans le commerce, dans l’agriculture, dans les arts, dans les lettres, toutes choses qui, pour bien aller, n’ont besoin que d’un point, c’est que le gouvernement ne se mêle pas de leurs affaires, soit pour les diriger, soit pour les contrarier. Tous ces grands élémens de l’activité sociale ne demandent au gouvernement que de faire une bonne police et de maintenir l’ordre. Ils se chargent du reste.

Pendant que le gouvernement continue à veiller au maintien du bon ordre et aide ainsi de la manière la plus efficace à la convalescence de la société, l’assemblée législative, en dépit des agitations convulsives de la montagne, fait de bonnes lois ou défait les mauvaises, ce qui est le grand point. Nous voulons parler ici du rétablissement de l’impôt sur les boissons. C’est, selon nous, le plus grand fait politique de la dernière quinzaine.

418 voix contre 241 ont décidé le maintien de l’impôt des boissons. On nous permettra de revenir sur cette discussion mémorable, et de chercher à faire ressortir quelques-unes des vérités qu’elle a mises en lumière. Nous vivons dans un temps où il ne faut pas se lasser de répéter les vérités utiles, et il n’y en a pas de plus importantes, en ce moment, que celles qui tendent à démontrer l’extravagance de la plupart des attaques dirigées contre notre système d’impôts.

On sait que la taxe sur les boissons remonte, en France, aux temps de l’ancienne monarchie. Perçue à l’aide de moyens vexatoires, les seuls que connût alors une fiscalité peu habile et peu scrupuleuse, elle a excité dans l’origine de justes plaintes qui sont peut-être encore la principale cause de son impopularité dans quelques-unes de nos provinces. Les lois et l’expérience administrative ont cependant corrigé peu à peu les abus de la perception. En dernier lieu, la restauration, puis le gouvernement de juillet, ont établi l’impôt sur les bases qui sont actuellement en vigueur, et que tout le monde connaît. Aucune quantité de vins, eaux-de-vie, liqueurs, etc., ne peut être déplacée sans une déclaration expresse. Cette formalité est la base du système en ce qu’elle assure le recouvrement des droits à chaque mouvement de la matière imposable. Les droits sont de plusieurs sortes. Il y a, premièrement, le droit de circulation, qui se perçoit lors de l’enlèvement des quantités destinées à la consommation intérieure du pays. Ce droit varie, pour les vins, d’après un tarif qui se divise en quatre classes, selon le prix de vente en détail dans chaque dépar-