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donc de décréter l’admission pure et simple de la Californie dans l’Union pour vider aussitôt la question qui, l’année dernière, a passionné tous les esprits.

Reste le Nouveau-Mexique, c’est-à-dire le vaste territoire qui a été cédé aux États-Unis à l’issue de la dernière guerre. La constitution mexicaine y a aboli l’esclavage il y a plus de trente ans, et les habitans, en demandant au congrès américain que leur pays fût érigé en territoire, ont demandé aussi que l’on maintînt l’interdiction dont l’esclavage est frappé chez eux. Les habitans du Texas réclament au contraire la presque totalité du Nouveau-Mexique comme une ancienne dépendance de leur état, et si cette prétention était sanctionnée par le congrès, la constitution du Texas, qui proclame la nécessité et la perpétuité de l’esclavage, deviendrait applicable au Nouveau-Mexique. Quelques-uns des états du sud soutiennent les prétentions du Texas, et tous sont opposés à l’interdiction de l’esclavage dans le Nouveau-Mexique, parce qu’ils veulent conserver à l’esclavage la voie d’un développement ultérieur, et qu’ils espèrent que de nouveaux états à esclaves, en se formant au-delà du Mississipi, viendront compenser l’accroissement d’influence que le nord reçoit du rapide défrichement de toutes les contrées situées aux bords des grands lacs. Il est facile d’ajourner la question, de laisser le Nouveau-Mexique se peupler, et choisir lui-même entre l’esclavage et la liberté le jour où sa population lui donnera le droit de voter une constitution et de prendre le rang d’état. M. Clay, M. Benton, et avec eux tous les hommes impartiaux du sud, reconnaissent qu’il est impossible d’imposer de nouveau l’esclavage à une population qui en a été délivrée et qui n’en veut plus. En outre, dans le Nouveau-Mexique, il y a eu fusion entre les Espagnols et les noirs, et entre ces deux races et la race des Indiens indigènes. La majeure partie de la population est métisse, et il est très peu d’hommes qui n’aient dans leurs veines quelques gouttes de sang noir ou de sang indien. Une telle population ne souffrira jamais qu’on rétablisse au milieu d’elle l’esclavage, parce qu’elle s’exposerait à subir tout entière la dégradation civile qui, aux États-Unis, poursuit le mulâtre, même après que toute différence physique est effacée. On est donc assuré de trouver dans la population du Nouveau-Mexique, toute faible qu’elle soit, une résistance désespérée. En outre, la nature du sol et la rigueur relative du climat rendent le Nouveau-Mexique impropre aux seules cultures pour lesquelles le travail esclave est supérieur au travail libre, c’est-à-dire le sucre, le riz, le coton et le tabac. La volonté des hommes sera forcément impuissante, et l’esclavage n’abandonnera pas les plaines humides et fécondes du Texas pour les montagnes du Nouveau-Mexique. Il n’est pas impossible de circonscrire étroitement la portion du Nouveau-Mexique qui est habitée en lui assurant la liberté,