citoyens complets ; ce serait avouer en même temps que la possession d’esclaves, au lieu de constituer une propriété légitime, apporte avec elle une incapacité civile. Après avoir établi par ces argumens que le bon droit est du côté des habitans du sud, le manifeste les exhortait à aviser sérieusement pour mettre un terme à un système d’attaques persévérantes et d’empiétemens successifs qui a pour résultat de dépouiller les états à esclaves de leurs droits légitimes et qui les menace dans leur existence.
Pendant que ce manifeste devenait, dans tout le sud, le signal d’une série de manifestations, une agitation en sens contraire s’organisait dans les états du nord. Le succès significatif obtenu par les free-soilers dans l’élection présidentielle et dans les élections particulières avait doublé leur ardeur, et les hommes politiques du nord, par leur empressement à se déclarer en faveur du nouveau parti qui paraît devoir disposer désormais des élections, par leur zèle de convertis à provoquer des réunions, à prononcer des discours, à publier des lettres en faveur de la liberté du sol, n’ont pas cessé de donner des alimens à une propagande déjà trop active. Rivalisant les uns avec les autres, et tenant toujours le public en haleine, ils ont fait de l’agitation abolitioniste une sorte de fièvre qui ne s’est pas ralentie un seul instant dans tout le cours de l’été. Conventions sur conventions ont été tenues dans tous les états pour protester contre le maintien de l’esclavage dans le district fédéral, et contre toute extension nouvelle de ce fléau. Les termes les plus violens et les plus blessans pour les états du sud ont été employés comme à dessein dans la rédaction des résolutions destinées à être publiées. Des hommes de tous les partis ont assisté à ces réunions, y ont pris la parole, et ont souscrit aux motions injurieuses pour le sud. Le démocrate John Van Buren, dans la convention de Cleveland (Ohio), a dépassé les philippiques les plus virulentes que le whig Daniel Webster ait jamais dirigées contre l’esclavage. À peine quelques journaux ont-ils élevé la voix pour dire que cette effervescence abolitioniste menait droit à la rupture de l’Union ; rien n’a pu arrêter l’irrésistible torrent qui paraît avoir emporté jusqu’aux barrières qui séparaient autrefois les partis, et onze législatures ont donné aux députés et aux sénateurs de leur état le mandat impératif d’introduire le proviso de Wilmot dans les bills qui régleront le sort de la Californie et du Nouveau-Mexique. La législature du Michigan, état tout démocratique, a été la première à adresser ce mandat impératif au général Cass, dont les chances à la présidence résident dans l’appui que lui ont toujours donné les états du sud à cause de ses opinions favorables à l’esclavage. Cet accord des whigs et des démocrates du nord pour imposer à leurs représentans un vote hostile aux états du sud acquiert plus d’importance encore par la position qu’occupent dans le nouveau congrès les partisans