Cette secte des vieux croyans hostile au czarisme moderne se rattache directement au slavisme, qui, lui aussi, se nourrit de traditions et tire sa principale force des origines de la race.
À côté de cette secte puissante, qui regrette ainsi le passé, combattu par Pierre-le-Grand et ses successeurs, il y a d’autres sectes d’une tendance tout opposée. Ici, suivant M. de Haxthausen, règnent un esprit réformateur et des idées essentiellement destructives des principes fondamentaux de l’église. Si l’église orientale ne sort pas bientôt de la sphère mystique de ses formes, si elle ne développe pas sa théologie, elle sera enfin entamée par les tendances spéculatives qui germent au fond de ces hérésies, et finira par en recevoir de périlleuses atteintes. Parmi ces sectes, l’écrivain allemand cite principalement les malakani et les douchoborzi, qui datent du siècle dernier. Quand Napoléon pénétra en Russie, les malakani crurent voir en lui le lion de la vallée de Josaphat venant détrôner le faux empereur et rendre la couronne au véritable tzar blanc. Ceux du gouvernement de Tambow résolurent de lui envoyer une députation qu’ils habillèrent de blanc, et qu’ils dirigèrent à sa rencontre pour le complimentes. Ces envoyés traversèrent la Petite-Russie et pénétrèrent jusqu’à la Vistule, où ils furent faits prisonniers ou dispersés. Les douchoborzi, connus aussi sous le nom de francs-maçons, issus des malakani, ont donné la formule de la pensée commune. Cette pensée a été exposée par les sectaires eux-mêmes avec éloquence, à la fin du siècle dernier, au sujet d’une enquête dirigée contre eux. Ils l’ont depuis portée à un plus haut degré de précision. Voici les paroles que M. de Haxthausen attribue à ces simples paysans : « Le Christ était fils de Dieu ; comme nous pouvons l’être également. Croyez-nous, nos anciens en savent encore plus que le Christ ; interrogez-les. Le Christ était homme comme nous, car il naquit de la chair. Il demeure en nous, car, conçu spirituellement comme dans le sein de la vierge Marie, il naît dans l’esprit de chaque chrétien. Bientôt il se retire dans le désert, c’est-à-dire dans la chair, où il est tenté par le diable, qui fait parler en lui les appétits sensuels, l’orgueil et la soif des honneurs et des biens de ce monde. Quand il s’est fortifié en nous, il nous adresse des paroles d’enseignement, et, après de nombreuses persécutions, il subit la mort sur la croix ; il descend au tombeau de la chair, ressuscite le troisième jour, resplendissant de gloire céleste dans l’ame de ceux qui souffrent jusqu’à la dixième heure du soir, réside en eux quatre jours, embrase leur cœur d’amour divin et conduit l’ame aux cieux, où il la dépose sur l’autel de Dieu, comme une sainte et agréable offrande. » À la suite de troubles qui éclatèrent parmi les douchoborzi de la Malotschna, une commission, nommée en 1835 par l’empereur, se livra à une enquête minutieuse, qui ne dura pas moins de quatre ans. Leurs doctrines ont paru si dangereuses,